L
e froid, la faim : des fléaux discriminants qui déciment surtout les pauvres... Voyant la santé de sa petite décliner, Claude ne voit d'autre solution que de voler du pain car celui qu'il achète avec son maigre salaire ne suffit pas. Seulement voilà, il s'est fait prendre. À la maison centrale de Clairvaux, il sera assigné à la confection de chapeaux. Cependant, en travaillant autant que dehors, les rations sont encore plus maigres. Il est temps de se rebeller : en face, le directeur est bien décidé à maintenir sa position de force.
C'est un court roman de Victor Hugo écrit en 1834 que Séverine Lambourt se propose d'adapter ici ; un conte politique et social dans lequel le personnage principal est un sans-le-sou, un nécessiteux. Cette histoire est très simple et manichéenne, de ce fait, elle n'en est que plus efficace car le message est clair : la réponse de la société est inadaptée aux dérèglements qu'elle prétend soigner. Contexte oblige, cela représente également un virulent réquisitoire contre la peine de mort, fer de lance de l'auteur originel. La scénariste prend le temps de présenter le condamné : un homme honnête, intelligent et attentionné, qui finit par devenir très populaire parmi les autres prisonniers grâce à son courage, sa sagesse et sa détermination. Par contre, il est détesté du personnel carcéral auquel il n'hésite pas à tenir tête. En conséquence, l'empathie naît très facilement. La grande force de l'ouvrage tient dans le rythme et la narration : peu d'action, tout se joue dans le rapport de forces entre le haut fonctionnaire et le détenu. L'ennui ne pointe jamais le bout de son nez, au contraire, le lecteur est tenu en haleine jusqu'au dénouement. Claude Gueux est à la fois un héros et un martyr, il est le reflet de la société et de la justice.
Springer (Volunteer, La boussole, La Petite souriante) offre de beaux plans offrant des perspectives remarquables. La palette de couleurs passées se révèle restreinte pour mieux restituer la grisaille ambiante, l'époque et la dureté du milieu. L'ajout de jolis effets de lumière éclairent intelligemment l'ensemble. Son trait précis et légèrement caricatural propose de vraies «gueules» qui reflètent les personnalités. L 'immersion est immédiate.
Une excellente mise en images de l'œuvre engagée d'un humaniste, pas la plus connue certes, mais elle mérite amplement le détour au vu de cette lecture passionnante et parfaitement illustrée.
Un album au dialogue rébarbatif
Le bras de fer entre un détenu et le directeur de la prison est ennuyeux : il aurait fallu peut-être approfondir le scénario
Reste les dessins de Benoît springer, toujours aussi bons, au trait épais
Bref, pas indispensable
Je ne connaissais pas l’œuvre originale de Victor Hugo qui est l'un des plus importants écrivains de la langue française. Le support BD m'a permis de réparer cette lacune. Il est vrai que je ne suis pas un lecteur de roman et d’œuvres littéraires mais j'adore la BD dont le format me convient parfaitement.
A l’origine, Claude Gueux est un fait divers que Victor Hugo a adapté dans une courte nouvelle pour dénoncer les conditions de détention au XIXᵉ siècle, la disproportion des délits et des peines. Le vol d'un pain pour sauver votre fillette de la famine pouvait mener droit en prison sans aucune considération des circonstances particulières. On doit protéger le bien du bourgeois. C'est encore vrai de nos jours.
Je me souvenais que dans une autre de ses nouvelles, le même Victor Hugo dénonçait la peine de mort avec plus d'un siècle d'avance sur Robert Badinter qui a finalement réussi à faire triompher cette idée remise en cause actuellement par certains intellectuels chroniqueurs surfant sur la vague du populisme.
Je dois bien avouer que j'aime beaucoup les valeurs véhiculées par Victor Hugo, ce génial dramaturge et poète du XIXème siècle. Il pose les bonnes questions à savoir comme une société peut amener un individu à commettre des crimes. Bien entendu, il ne faudra pas excuser tous les actes mal intentionnés mais s'interroger sur ce qui amène à la violence.
Dans une société où l'on privilégie les victimes, le directeur de prison recevrait un hommage national ainsi que des louanges de la part de chaque gardien pénitencier. Or, on découvre un être vil et malfaisant qui fait régner l'injustice pour conserver son pouvoir et autorité.
Alors, oui c'est court mais c'est démonstratif comme jamais. Il ne suffit pas d'un long roman mais de choses simples qui peuvent mener à une réflexion. L'efficacité sera de mise dans cette BD qui nous offre le meilleur de l’œuvre originel. Evidemment, cela demeure d'actualité dans un monde où on peut revenir en arrière à tout moment comme un cycle dans l'histoire.
Ce projet émotionnellement très puissant (on n’adapte pas Victor Hugo à la légère!) frise l’épure. Doté de très peu de textes, l’album porte essentiellement sur un découpage lent, répétitif mais extrêmement parlant, jouant sur les regards et les champs-contre-champs pour faire ressentir l’incompréhension d’un homme bon, calme, bon camarade qui assume sa faute (le vol de pains et de bois pour son fils et sa femme) en purgeant une peine qu’il ne conteste pas. Le cadrage suit Gueux à chaque instant et les planches ne visent pas le misérabilisme. Très fort pour croquer des visages réalistes, Springer apporte une matière à ses dessins par des estompes charbonnées. A la fois précis dans les décors et dans des gueules incroyablement expressives, il donne forme à la simplification documentaire que vise le texte original, comme un BRUT en format BD.[...]
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