P
rosopopus… ce nom résonne comme un mystère, une énigme insoluble… Que peut bien désigner ce mot si étrange, si étranger ?
Tout commence par une immense zone d’ombre, une ville obscure et tentaculaire qui se cache sous la fumée grise qui en émane… une ville triste où règne la loi du sang, du sexe et de l’argent… une ville où toute trace d’amour est immédiatement polluée par la corruption d’un monde en dégénérescence…une ville où naîtra un monstre improbable, qui pourrait paraître grotesque s’il n’était pas si terrifiant…
Intrigant… C’est bien le mot qui sera sur toutes les lèvres à la lecture de cet album particulièrement hors normes, entièrement muet. Nicolas de Crécy nous livre ici un one-shot atypique qui réjouira les uns et effrayera les autres. Difficile, effectivement, de faire l’unanimité avec une œuvre si personnelle, si éloignée de ce qui a déjà été fait.
Laissons donc tout un chacun juger par lui-même de la qualité de cet album, de son intérêt et de sa pertinence.
Mais empressons-nous de saluer la performance de l’auteur qui parvient à nous raconter une histoire fort complexe en ne recourrant qu’à l’image, et qui ne se contente pas d’une narration linéaire, mêlant habilement passé et présent au risque de dérouter encore plus le lecteur. Le dessin si particulier de De Crécy pourrait également en rebuter plus d'un mais force est de constater que son trait hachuré, unique en son genre, rend à merveille l'ambiance particulièrement lugubre du récit et les tourments endurés par les personnages. Au final, il parvient à leur donner une véritable personnalité sans les faire parler et le lecteur finit par s'y attacher. Une prouesse qu'il convient de souligner.
Pour finir, saluons l’éditeur qui a su s’écarter des voies les plus courues de la bande dessinée pour nous proposer ce voyage dans l’imaginaire particulièrement débridé de l’auteur, au risque de « casser » l’image de la noble collection Aire Libre. Mais ne se veut-elle pas justement, comme son nom l’indique, un espace de création et d’infinie liberté ?
Qu’il plaise ou qu’il ne plaise pas, là n’est pas la question. Cet album a le mérite d’exister. Laissons à chacun le soin de le percevoir comme il l’entend.
Poster un avis sur cet album