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ne couverture où copulent deux dinosaures sous le regard d’un canard à l’expression lubrique, un patronyme totalement cliché, des couleurs criardes : tels sont les obstacles initiaux que doit franchir le lecteur s’il veut avoir une petite chance de pénétrer dans cet univers déglingué. Joe Galaxy, individu à tout faire, est amoral, de mauvaise foi, souvent d’humeur massacrante, intéressé, cynique, insensible, vil et vénal. Toujours entre deux prostituées, il vend ses services à la pègre et se donne toujours au plus offrant. Il n’a pas de parole ; ses valeurs tiennent dans son pistolet désintégrateur. Il est aussi très drôle.
C’est l’italien Massimo Mattioli (1943-2019) qui a donné vie à ce Donald pervers en 1979. Après une collaboration à Pif Gadget (M. le Magicien) au début des années 70, il créera Pink, s’associera à la bande dessinée alternative de la botte transalpine et publiera dans L’Écho des Savanes. Il commettra des récits de son voyageur sidéral jusqu’en 2018. Cette série intègre tous les codes de la Science-Fiction, les pousse à leur paroxysme et les assaisonne de dérision, d’humour potache et d’absurde. C’est l’esprit des premières années de Métal Hurlant, dans le sillage de Druillet et Moebius, mâtinés de Gotlib. Entre Le Garage hermétique, Lone Sloane et l’esprit Rubrique-à-Brac, les tribulations de « l’aventouriste de l’espace », comme il aime à se désigner, oscillent entre non-sens, retournement des codes du genre et défouloir tous azimuts.
Fréquemment, au début d’un épisode, Joe ne sait pas où il se trouve : « Je n’avais pas la moindre idée de l’endroit où j’étais en train d’aller. Je suivais mes pieds ». Il n’en faut pas plus pour enchaîner des événements à un rythme déboussolant. La trame narrative n’est d’ailleurs qu’un prétexte à rigolades, pieds-de-nez, exagérations et impertinence. Il y a quelque chose de rabelaisien dans les déambulations de ce psychopathe. Un rire gras et une totale liberté. Malléable à merci, Joe Galaxy sauve le monde, raconte l’extinction de l’humanité après une guerre opposant pizzas et burgers, devient profanateur de sépultures, revisite l’histoire de la télévision, se fait toréador, combat le peuple sanguinaire des canaris ou vit sa propre mort.
Mêlant le langage polar au contexte SF, multipliant les références (Raymond Chandler, Philip K. Dick, Alfred Hitchcock, Jurassic Park, Star Wars et bien d’autres), créant un univers violent et sexuel, viscéralement iconoclaste, Mattioli provoque une jubilation de lecture aussi flamboyante que ses mises en pages délirantes et son traitement chromatique agressif. Si l’idée du Vagabond des limbes vampirisé par Édika n’effraie pas, cette réédition par Revival de ces vingt-cinq voyages intergalactiques (dans laquelle se trouve un joli cahier de seize pages avec des délires courts) doit être consommée en urgence. « Comment on se sent après deux semaines d’hyperespace ? Les yeux révulsés, le bec en gélatine, les couilles qui passent de 2 à 180, un goût de friture de rat dans la bouche, les doigts comme des cheveux, les cheveux comme des doigts, etc., quand soudain l’ordinateur de bord signale Électro. Enfin une putain de planète ! » Le ton est donné. Foncez !
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