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a Souterraine 23300, Creuse. S’occupant principalement de sous-traitance automobile, GM&S est une entreprise moyenne comme il en existe des milliers au cœur des zones industrielles. Pris dans un infernal cycle « faillite/reprise/restructuration » depuis une trentaine d’années, ses employés sont à bout. Ballottés, tant par d’hypothétiques repreneurs attirés par les subventions que des politiciens soucieux de leur image, ces ouvriers ont bien tenté de lutter : grèves, délégations, médiations et actions coups de poing. Tout ça en vain, car ici rien ne change. Le futur demeure immanquablement synonyme d’incertitude, de fermeture et de chômage. Mondialisation, flexibilité, adaptabilité, manque d’innovation, ce ne sont pas les raisons qui manquent.
Reportage au long cours, Sortie d’usine est une plongée captivante dans la réalité qui se cache derrière ces annonces de fermetures de sites industriels qui font si souvent la une des journaux. S’il y a une manifestation et du grabuge, ça devient immédiatement plus intéressant. L’info fera peut-être le vingt heures. Quoi ? Un dirigeant a été séquestré ?! Sur le champ, un ministre concerné et exaspéré ira de sa petite allocution. Par contre, après que les dernières palettes ont fini de se consumer et que les médias sont partis, ce sont deux cents individus qui se retrouvent sur le carreau. Deux cents vraies personnes auxquelles il faut ajouter autant de familles, un bourg, ses commerces, l’école et la poste. En gommant une ligne de production dans un bilan comptable, c’est toute une agglomération et sa communauté qui s'écroule.
Rencontres avec les acteurs d’aujourd’hui et d’hier, explications détaillées sur les dessous parfois peu reluisants de certaines décisions lourdes de conséquences, retour sur des épisodes clefs du passé, un peu d’histoire générale et autres rappels instructifs sur le fonctionnement d’une entreprise : les auteurs n’ont laissé aucune pierre non retournée. Mieux encore, l'ensemble est raconté d’une façon claire et sympathique. Car, oui, malgré la dureté du propos, la narration est extrêmement facile d’accès, presque légère. Pas de pathos ni de leçon de morale, seulement les faits dans leur entière brutalité.
Formidable balade au sein du monde des cols bleus, l’album se lit à la manière un roman social du XIXe siècle. Des personnages hauts en couleur, de la détresse, des espoirs (souvent bafoués), le tout au service d’une seule idée : travailler pour gagner sa croûte dans la dignité et le respect. À l’instar d’une journée d’atelier aux machines, le combat est difficile, les victoires fragiles et toujours temporaires.
La sensibilité d’un Etienne Davodeau, la rigueur journalistique d’un papier de La Revue Dessinée et une attention de tous les instants pour ces femmes et ces hommes écrasés par le système, Sortie d’usine est une lecture passionnante et indispensable pour mieux comprendre les enjeux socio-industriels actuels.
C'est une BD écrit par un journaliste reporter Benjamin Carle qui a suivi pendant trois ans les salariés d'une usine installée dans la Creuse et qui a fermé ses portes. C'est tout le combat d'ouvriers qui se sont battus pour leur emploi qui nous est conté à travers tous les enjeux économiques qui touche notre pays depuis les années 80.
On se souvient tous de la fameuse phrase du président Macron alors en visite sur les lieux: « Je ne suis pas le Père Noël ! ». En même temps, c'est plutôt véridique car il ne lui ressemble pas vraiment. On se rend compte parfois de la soi-disante impuissance du politique face aux forces économiques qui animent le capitalisme dans ses effets les plus sournois.
Cette BD va plus loin en dressant le portrait d'une France en proie à la désindustrialisation ce qui pourra à long terme avoir des conséquences plutôt néfastes en cas de pandémie prolongée par exemple surtout si on ne produit plus des produits de première nécessité.
Je ne peux qu'être solidaire par rapport à ces pauvres gens qui ont tant investi de leur temps de vie. Je ressors plutôt meurtri d'une telle lecture qui sera plutôt déprimante sur notre devenir. Une usine qui ferme dans un département rural, c'est beaucoup d'emplois annexes qui sont également touchés à commencer par les commerces. C'est toujours triste mais on l'accepte comme une fatalité.
Pour la petite histoire, on notera une aversion de l'auteur pour les trottinettes électriques et ceux qui les conduisent (dont je fais partie). Pour autant, je ne lui en tiendrais pas rigueur car il aime cependant les marinières.
En résumé, une œuvre qui nous montre la lutte des travailleurs de G§M pour défendre leur emploi ainsi que la trahison des pouvoirs publics et des repreneurs successifs.