L
e lapin Titus Caropin est un écrivaillon raté qui puise son inspiration dans divers élixirs. Hanté par la mort, il cohabite avec Desseres, une sorte de cochon scientifique dont les expériences tournent le plus souvent aux désastres. Le canard Souchet est un redoutable occultiste. Il revient parfois de ces déplacements astraux pour séparer ses colocataires querelleurs. Un jour, attirés par les sirènes d’un camion-glace, les braves amis quittent leur logement quelques heures. Aussitôt, leur maison décide de fuir sa condition de domicile. C’est le début d’une folle cavalcade !
Thomas Blais-Leblanc, dit Thom, construit une histoire peu banale. Deux ans après avoir remporté le prix Réal-Fillion du meilleur premier album, décerné à l’occasion du festival Québec BD 2018, l’artiste récidive avec un nouveau récit muet. L’auteur y anime la même galerie de personnages que celle développée à l’occasion de VII. Seulement cette fois-ci, chacun devient la vedette de son chapitre. Au centre de son intrigue absurde, ces trois confrères sont mis à la porte par leur propre habitation. Véritable deuil de la vie commune, les protagonistes oscillent alors entre immobilisme, désir d’imposer leur volonté et aspiration à plonger à cœur perdu dans une quête identitaire.
Au fil des pages silencieuses, le jeune bédéiste démontre sa maîtrise de la narration dépourvue de parole. Il adopte un graphisme un tantinet schématique, en noir et blanc, fait d’un trait épais et de nombreux aplats. Outre les merveilleuses trouvailles scénaristiques relatives au mage palmipède (influencé par le courant expressionnisme allemand), le dessinateur s’adonne habilement à l’humour de situation. En ce sens, le piètre savant forme un savoureux parent de Wile Ethelbert Coyote des studios Warner Bros - aussi obsessionnel que terriblement malchanceux. Ce rendu « cartoon» est assumé et véhicule une légèreté bienvenue en contrepoint avec les événements qui frappent, sans tambour ni trompette, ces anti-héros.
La structure éditoriale montréalaise Pow Pow a judicieusement opté pour un format de poche doté d’une couverture souple à rabats ce qui, en plus d’assurer une bonne prise en main, donne l’envie de se replonger goulûment dans une relecture trépidante.
Portée par un style rond et des gags visuels, l’amusante péripétie Casa Rodéo se révèle d’une profondeur philosophique inattendue !
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