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agali a 11 ans, elle entre en sixième année à l’école polyvalente privée Massillon, dans le 4e Arrondissement parisien. Rapidement, rien ne va plus, elle craque sous la pression et une psychologue lui diagnostique une phobie scolaire. La préadolescente étudiera donc à la maison. Elle est entourée par une mère et un père attentifs, une enseignante la rencontre tous les mardis et elle voit régulièrement sa thérapeute. Sans contacts sociaux, elle finit cependant par présenter des symptômes d’agoraphobie et se réfugie dans l’univers des compositeurs de Help et Here Comes the Sun.
L’adolescence n’est pas un âge facile. Magali Le Huche raconte, sans filtre ni complaisance, une tranche de sa vie. Il est difficile de demeurer insensible à la douleur de l’héroïne qui s’isole de plus en plus. Son histoire en est une de croyances. D’abord le père Noël, puis Dieu et enfin les Beatles qui, c’est bien connu, sont plus populaires que Jésus-Christ. Il y a une forme d’intégrisme dans sa démarche ; elle n’écoute plus que John, Paul, George et Ringo, elle en parle constamment et tente de convertir les gens à leur musique, convaincue que tout le reste ne mérite pas d’être entendu. Par excès de dévotion, elle vandalise même les affiches de Patrick Bruel, objet de l’adoration des jeunes filles au début des années 1990. Faible estime de soi, isolement, prosélytisme, destruction des icônes, tout cela a un air de déjà-vu. Il va de soi que le jihad de la gamine se révèle moins destructeur que celui de Daesh, mais il y a tout de même d’étranges similitudes.
Le dessin, souvent très sommaire, se met au service de la narration. Au premier abord rébarbatif, il se montre toutefois particulièrement efficace pour traduire les états d’âme de la protagoniste. Le style imparfait et rondement exécuté donne un peu l’impression que c’est l’enfant qui dessine et accentue ainsi le réalisme du projet. Quelques planches allégoriques évoquant les quatre liverpuldiens et leur œuvre sont réussies ; il est d’ailleurs amusant d’y chercher les références aux chansons du quatuor de musiciens.
Un récit poignant, à mettre entre les mains de toute fillette qui se sent mal dans sa peau. En fait non, recommandons-le plutôt aux parents inquiets.
Magali rentre en 6ème. Mais très vite, les choses vont tourner court et elle va développer une phobie scolaire. Sa bouée de sauvetage? Les Beatles.
Ce récit autobiographique m'a énormément touché. Il décrit les causes et les conséquences de la phobie scolaire de la Bédéiste. Mais, au-delà de cela, c'est aussi la façon dont elle s'en est sortie qui nous est racontée. Magali Le huche met donc des mots simples et clairs sur ce qu'elle a vécu. Elle semble jeter un regard indulgent sur cette période de sa vie.
Le scénario, touchant,, offre aussi un message positif pour les personnes souffrant de phobie scolaire.
La BD alterne des planches en noir et blanc où seule la couleur des cheveux de la narratrice apparaissent avec des planches qui explosent de couleurs. Les couleurs sont d'ailleurs réservées à l'univers des Beatles. Elles donnent de la vie et du peps à l'ensemble comme la fait le groupe dans sa propre vie. D'ailleurs, les planches colorées sont mes préférées, je les trouve sublimes.
Nowhere Girl est donc une BD touchante qui aborde un sujet toujours d'actualité.
Si Magali Le huche passe par là, j'ai une petite question: Paul Mc Cartney a -t-il répondu à l'envoi de votre dessin?