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uelques mois ont passé depuis les terribles évènements qui ont permis de lever une partie des ombres qui planent sur Hobtown (cf. L’affaire des hommes disparus). Noël arrivant, le Club des détectives amateurs a décidé de repousser ses activités à plus tard. Alors que certains partent vers le Sud et le soleil, Pauline et Brennan ont eu la «chance» d’être sélectionnés par la très distinguée et mystérieuse académie de Knotty Pines. Exit la plage et le farniente, place à des vacances studieuses ! Ils vont être pris en charge par cette prestigieuse et exigeante institution qui a fait de la discrétion et de l’obéissance des vertus premières…
Kris Bertin et Alexander Forbes sont déjà de retour avec un deuxième tome des Mystères d’Hobtown. Piochant allégrement dans la littérature adolescente gothique d’hier et d’aujourd’hui, ils ont imaginé un récit macabre jouant sur les peurs primaires. Plus largement, c’est également un bel exemple de roman initiatique du passage à l’âge adulte ; spécialement à propos de cet instant où chacun réalise que les mots et les actes des « grandes personnes » ne sont pas toujours synonymes de vérité absolue. Les auteurs en profitent aussi pour lancer une charge féministe à peine voilée sur la manière dont la société formate les genres. Pas d’attaque frontale ou de revendication pour autant, ces réflexions s’avèrent parfaitement intégrées à l’histoire.
Plus resserré que L’affaire des hommes disparus, le scénario tourne uniquement autour du pensionnat et de ses résidents. Visiblement plus à l’aise avec cette distribution limitée (les autres membres du club n’apparaissent que très sporadiquement), les auteurs offrent une intrigue dense et habitée. Ils s’aventurent dans des scènes oniriques et rendent au passage hommage à quelques maîtres du genre (Charles Burns en premier lieu, mais aussi Chester Brown période Ed the Happy Clown). Sur un plan purement technique, ils font preuve de plus d’homogénéité, tant dramatique qu’artistique. Le trait d’Alexander Forbes, tout particulièrement, se montre solide, riche et doté d’une fluidité remarquable. Le format réduit de l’ouvrage en devient presque regrettable.
À la limite du pastiche, mais sans jamais tomber dans la parodie, L’ermite maudit est une lecture prenante, remplie de suspens divers et variés. Mêlant audacieusement classicisme exacerbé et péripéties déjà vues mille fois avec des préoccupations toutes contemporaines, Kris Bertin et Alexander Forbes réussissent leur deuxième essai avec ce qu’il faut effronterie et de brio pour convaincre.
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