Mills, ou la folie à l’état pur
Résurrection… Un monde à l’envers, où terre et mer sont inversées, où le temps recule, et où la valeur d’un homme dépend du mal qu’il a fait sur terre. Un monde où les chevaliers vampires règnent en maîtres absolus. Un monde dans lequel Heinrich se retrouve après sa mort, lui qui périt sur le front de l’Est alors qu’il se battait sous les ordres du Fürher et commettait les pires exactions. Il y sera adoubé sous le nom de Requiem. En effet, qui mieux qu’un ancien SS peut prétendre appartenir à la plus haute caste de Résurrection ?
Mais Requiem est aussi un être profondément humain, tiraillé entre sa dévotion pour le dogme nazi et son amour pour Rebecca, une jeune femme sublime dont le seul défaut est d’être juive… Et voilà que nous nous prenons d’affection pour cet être sanguinaire…
Ce déchirement se poursuivra sur Résurrection, Rebecca s’y étant réincarnée en lémure, un être qui revient à la « vie » pour hanter ses anciens tortionnaires. Mais il prend place dans un cadre plus large, celui de la confrontation entre des entités divines mystérieuses, vampires et lémures se livrant une lutte sans pitié au milieu de toute cette violence. Chacun tente de survivre, de s’allier le plus de castes possibles, et de s’imposer dans cet univers de complots, de guerre et d’incessantes trahisons.
Les différentes races se font sans cesse plus nombreuses, les intrigues plus complexes, et le rôle que jouera la relation entre Requiem et Rebecca dans cet écheveau de conspirations plus mystérieux que jamais. L’histoire avance lentement, Mills prenant bien le temps de développer son univers en même temps que son scénario.
Ledroit, ou l’héritier du gothique flamboyant
Beaucoup de dessinateurs se sont écartés d’un cadrage traditionnel pour s’essayer à une mise en page plus éclatée. Pour certains, ce fut un échec. Pour d’autres, ce fut une réussite. Pour Ledroit, c’est à chaque fois un chef d’œuvre. En effet, il semble le seul en mesure de conserver une grande lisibilité tout en chargeant ses planches de mille et un détails. De plus, ses couleurs directes, parfaitement maîtrisées, viennent sublimer son dessin déjà d’une grande pureté pour nous offrir des planches qui baignent véritablement dans le sang.
De l’utilité d’une telle série
Certains diront qu’il ne s’agit que d’une débauche d’effets visuels, certes magnifiques, mais qui n’apportent rien. Que le scénario n’est qu’une succession d’actions et de combats. Que l’utilisation des personnages historiques n’est pas suffisamment exploitée. Que la réflexion sur le Bien et le Mal qui aurait pu s’y trouver n’est qu’effleurée. Que cette série est avant tout distrayante et peu propice à une lecture plus approfondie...
Et bien, ceux-là n’auront pas tout à fait tort…
Ne s'agirait-il que d'une simple apologie de la violence? Ou bien en serait-elle au contraire sa dénonciation, la mise à découvert du mal qui nous ronge de l'intérieur? A chacun sa perception de l'oeuvre.
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