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epuis l’adolescence, August Crimp s’isole afin d’endosser discrètement des vêtements féminins. Et, aussitôt, il s’envole ! Une fois, sa mère l’a contraint à suivre une thérapie en raison du fait qu’enfant, il avait manifesté sa volonté de devenir une femme. Dès lors, il est hors de question que quiconque soit informé du plaisir qu’il éprouve à se déguiser. Glissé dans une robe, il déambule devant les œuvres du Art Museum de Londres. Soudain, sa jeune voisine, Cherry Mingle, tombe à la renverse du haut de la terrasse du bâtiment culturel. Après quelques instants de tergiversation, le travesti se décide à sauver la gamine au risque de révéler son excentricité à la face du monde. Il s’élance, plane admirablement et attrape la fillette avant qu’elle percute le sol. Inexorablement, la môme reconnaît son bienfaiteur. Trois années se sont écoulées, le vigilant connu sous le nom de Dragman a reposé son costume. Il a également fondé une famille en gardant précieusement son secret. Lorsque la petite rescapée le menace de tout révéler s’il se refuse à rempiler pour récupérer l’âme de ses parents.
Steven Appleby est un dessinateur de presse au style jeté et tremblotant ayant collaboré avec The New Musical Express, Punch, The Times ou The Observer. En 2002, il place un strip de Dragman dans le quotidien The Guardian. Ses nombreux proches (listés dans les remerciements de l’album) le convainquent d’entreprendre la réalisation d’un roman graphique qui explore cet univers et témoigne du travestisme, étant entendu que l’illustrateur peut asseoir sa narration sur sa propre expérience. Effectivement, l’intéressé a toujours ressenti le besoin de se vêtir d’atours destinés à l’autre sexe. À compter de l’été 2007, il a même cessé de s’affubler du moindre accoutrement masculin. À la suite de dix-huit longues années de maturation, l’ouvrage paraît enfin Outre-Manche et reçoit les faveurs de la francophile Posy Simmonds (Tamara Drewe, Gemma Bovery, Cassandra Darke) :
« Il n’y a pas de super-héros plus super que Dragman, le héros travesti de Steven Appleby. Appelé aussi Dolly Marie, il mène contre les voleurs d’âmes de Black Mist un combat apocalyptique, névrotique, tendre, drôle – et brillamment dessiné. »
Le scénario repose sur plusieurs temporalités. Au présent, les séquences familiales succèdent à celles d’enquêtes. Alors, la dualité d’August entre son rôle de héros et celui de père dévoué introduit une touche drolatique à des scènes parfois un peu molles. Quant au passé, ce personnage principal s’interroge et raconte par le menu des événements qui visent à justifier les actions des protagonistes. Les propositions d’écriture donnent ainsi un peu de corps au macrocosme super-héroïque et sont, par conséquent, assez plaisantes. L’Anglais adopte par ailleurs un présupposé évident : les porteurs de collants ne sont pas tous foncièrement bons et ces individus doivent nécessairement percevoir des revenus. Ce type d’argumentaire a maintes fois été abordé au sein de titres cultes et violents (Marshall Law, Brat Pack, The Boys). Seulement, en l’espèce, un traitement léger apporte de la fraîcheur à ce genre de développement d’autant que l’ensemble se mêle à une quête d’acceptation de soi.
Graphiquement, le tracé de l’artiste est clivant. Il est lisible et faussement enfantin. Les décors sont souvent limités à la portion congrue et les proportions comme les perspectives sont plutôt approximatives. Pourtant, au gré des pages, son trait s’apprivoise puis s’apprécie. Parmi les nombreuses particularités de ce livre, la colorisation est réalisée par l’épouse de l’auteur, charpentière de métier ! Nicola Sherring opte pour une mise en valeur des plans par le biais de tons d’aquarelle délicatement associés. Son pinceau délimite les cases laissées sans contour au moment de l’encrage. Surtout, elle accentue les flash-back par l’apposition d’un lavis bleu, simple et très efficace.
L’éditeur Denoël Graphic propose un volume qui brille davantage par sa construction, son humour british et sa contribution décalée au débat des genres que par le rendu visuel. Ce méli-mélo offre une lecture divertissante, immersive et détonante qui ne devrait pas vous laissez froids.
C’est d’abord une histoire intime. Celle de Steven Appleby lui-même. C’est ensuite une histoire qui met en lumière le débat du genre, du travestisme et plus globalement de l’acceptation de soi.
J’attendais beaucoup de cet album et je suis resté sur ma faim. Je n’ai été emballé ni par le scénario, ni par le dessin. L’idée d’utiliser la fiction plutôt que le témoignage pour aborder ce sujet sensible est intéressante et la trouvaille de ce personnage aurait pu être géniale. Mais derrière ce personnage il m’a manqué un souffle, un dynamisme, un scénario quoi !… j’ai eu bien du mal à aller au bout des 340 pages.
J’ai trouvé le dessin et la construction du récit trop statiques… C’est vraiment dommage car il y a des passages passionnants, ceux liés à sa jeunesse… Finalement, choisir le témoignage n’était peut-être pas une si mauvaise idée…