Le grand vainqueur des BDGest'Art 2008 est le Journal d'un ingénu signé Emile Bravo. « C'est tout, sauf une surprise ». Alors laissons la surprise de côté, penchons-nous sur ce « tout » (et le reste) ainsi que sur les résultats enregistrés dans les autres catégories.
Tout d'abord, l’équipe de bdgest.com vous remercie une fois encore d'avoir participé à cette consultation et espère vous avoir fait découvrir quelques titres grâce à la sélection, éclectique, proposée par le Jury. Comme d'habitude, la tâche de celui-ci n'a pas été si facile lorsqu'il a fallu retenir un éventail forcément réduit d'albums parmi les 3.592 nouveautés proposées cette année (source : rapport 2008 de l'ACBD par Gilles Ratier). Après dix-sept jours de compétition, plus de 1.500 votes ont été recueillis pour la catégorie principale, Meilleur album. Le nombre de suffrages exprimés est en progression de plus de 50 % par rapport à 2007, et trois fois supérieur à celui de 2006.
Pour le site, qui a fêté il y a quelques semaines ses dix ans d'existence, ce résultat est à la fois significatif et encourageant. Et l'équipe le place à côté de quelques autres : près de 49.000.000 de pages vues en 2008, 687 chroniques publiées et consultées près de 2.900.000 fois, 135 previews d'albums affichées par plus de 767.000 curieux etc..
Merci de votre fidélité et rendez-vous mi-décembre 2009 pour la prochaine édition. D’ici là, bonnes lectures !
Les premières aventures de Spirou vues par Emile Bravo (Dupuis) ont donc été l'aspirateur à suffrages escompté. Déjà récompensé à de multiples reprises, cet album reçoit donc un titre honorifique supplémentaire, décerné par des lecteurs. Là où les reprises de séries mythiques sont toujours sujettes à palabres, voire éreintées sur des forums – le nôtre n'étant pas en reste en la matière - Le journal d'un ingénu est non seulement passé entre les gouttes mais a été également accueilli par une haie d'honneur et un concert de louanges. Bien sûr, on s'est bien creusé les méninges ici ou là pour lui trouver quelques menus défauts, mais cet album a fait l'unanimité et c'est le plaisir qui a été récompensé. Le plaisir de retrouver un personnage emblématique du 9ème Art confié ces dernières années à diverses mains, qui plus est à ses origines, pour un moment de nostalgie précieux et un récit palpitant. Ceux qui ne ratent pas un épisode de l'aventurier ont fait corps avec ceux qui avaient abandonné le groom depuis bien longtemps. Joli tour de force pour un hommage, sans poussière ni empois, qui n'oublie pas de de s'inscrire dans le parcours personnel d'un habitué des palmes sur bdgest ((lauréat du Prix du Jury 2006 pour une série avec Une épatante aventure de Jules, Prix du meilleur album Jeunesse en 2007 avec Ma maman est en Amérique, elle a rencontré Buffalo Bill).
A la seconde place, un autre auteur déjà primé sur le site : Nicolas Juncker avait en effet été élu Prix du Jury 2005. Avec D'Artagnan - Journal d'un cadet (Milan), en choisissant le journal intime, il propose de revisiter un des romans les plus populaires de la littérature française. A l'heure où les adaptations des classiques, plus ou moins inspirées, fleurissent dans les collections, cet album constitue sans doute une référence pour montrer le type de voie, d'angle ou d'audace qu'il est possible d'emprunter pour satisfaire un public d'amateurs.
L'autre détail amusant repose sur le fait que les deux titres qui occupent les premières places du podium sont tous deux sous-titrés « Journal » alors qu'ils se placent à mille lieues d'un exercice on ne peut plus répandu à l'heure des blogs qui proposent épanchements nombrilistes, étalages spécieux de mal être assortis de gémissements risibles, présentés sous une forme indigente. Un genre à part entière qui occupe désormais une niche au sein du marché de la BD. Fin de parenthèse.
La troisième marche est brillamment occupée par une autre figure qui appartient au patrimoine collectif : Pinocchio. Si le livre original n'est en rien aussi lisse que la vision disneyenne qui a bercé tant de bambins, le livre de Winshluss est hautement jouissif. Audaces de tous les instants, provocations à répétition, modernité dans un écrin sous un habit – de fête – rétro, capable par instants de susciter des grimaces à la limite de la réprobation et à d'autres une complicité totale avec l'auteur : le lecteur sort secoué comme un prunier. Culottée, aboutie, soignée. Une œuvre marquante.
Où sont les personnages réellement nouveaux dans le palmarès 2008 ? Mesdames et messieurs les auteurs et éditeurs, pas de conclusions hâtives. N'allez pas croire que c'est toujours dans les vieux pots qu'on se penchera pour étancher faim et soif en 2009. Et rappelons que les intégrales n'ont ici pas droit de cité...
Les lauréats des années précédentes :
Et un doublé ! Déjà à la première place en 2007 pour le tome 1, Il était une fois en France (Nury – Vallée – Delf – Glénat) réédite son exploit avec Le vol noir des corbeaux, sa seconde partie. Là où bon nombre de tomes 2 ne suscitent pas le même engouement que leur prédécesseur, l'effet de surprise ne jouant plus et... les scénaristes diluant parfois leur nectar pour tenir la distance, cette évocation d'une période trouble de l'histoire récente est une nouvelle fois plébiscitée. L'heure de la confirmation pour Fabien Nury qui prouve qu'on peut être prolifique et inspiré. Prêt pour la passe de six ?
Plus surprenante peut-être, la seconde place occupée par le 4ème volet de la saga Sept (Delcourt). Tous les albums publiés à ce jour n'ont pas été du même calibre, mais le récit proposé par A. Ayroles, soumis au même challenge que ses petits camarades invités à conter l'histoire d'un groupe de sept personnages devant remplir une mission, a comblé plus d'un amateur. Il faut dire qu'en terme de mission, ces gaillards avaient peut-être l'expérience liée à la fonction... Toujours est-il que ce récit, enjoué, mouvementé, et toujours amusant grâce notamment à sa manière de jouer sur la nature de ses protagonistes s'est démarqué du lot. Sept missionnaires confirme également qu'il n'est pas d'entreprise qui ne puisse révéler d'excellentes surprises, fût-elle soumise à un cahier des charges.
Autre magnifique confirmation avec le deuxième volet de RG (Gallimard) proposé par P. Dragon et F. Peeters. L'immersion au cœur du quotidien des Renseignements Généraux continue de passionner grâce à son réalisme, tant pour la présentation des situations que pour l'exposé des réflexions de son personnage central. Vous avez dit « vécu » ?
Une fois encore, le Jury avait fait une place de choix au comics en sélectionnant trois titres qui font le bonheur des amateurs de récits coups de poings. La ferveur des fans n'a pas été partagée puisque le trio ne rassemble au total qu'environ 15% des voix.
Les lauréats des années précédentes :
La catégorie Dessin place, en 2008, deux pointures dans le monde du 9ème Art sur les plus hautes marches. Une trentaine d'années passées depuis la sortie de son premier album pour l'un, une vingtaine pour le second, et probablement des milliers de citations au cours de discussions entre amis pour illustrer le célèbre (et dont les fondements appartiennent à chacun) « tiens, voilà un beau dessin !». C'est, a minima, ce qui réunit les deux dessinateurs. Deux valeurs sûres.
Avec les aventures du Bouncer (Les Humanoïdes associés), A. Jodorowski et F. Boucq ont probablement trouvé des lecteurs au-delà de leurs fidèles en explorant un genre nouveau pour eux, sans pour autant renier leur style. Leur patte transparaît immédiatement dans cette histoire de bourreau façon western. Mais pour ne prendre que l'exemple de F. Boucq, il est évident qu'une partie du public a véritablement découvert l'auteur avec son manchot impitoyable. Ces lecteurs seront alors moins frileux à l'idée de se pencher sur ses œuvres précédentes, à défaut d'avoir osé jusque là aller plus loin qu'un coup d'œil trop rapide jeté à Jérôme Moucherot ou aux Aventures de la mort et de Lao-Tseu.
Pas simple de succéder au dessinateur de Thorgal, mais, en 2004, le risque est calculé lorsque celui de Murena relève le défi de La complainte des landes perdues. Avec le deuxième tome du second cycle, Ph. Delaby suit de près F. Boucq au palmarès 2008. La reprise de la série créée par J. Dufaux et G. Rosinski a été suivie avec assiduité et intérêt par les fans de la première heure. Aussi à l'aise dans l'univers de la fantaisie que pour illustrer les arcanes de l'Antiquité, l'auteur confirme avec Le Guinea Lord (Dargaud). Evidemment.
A la troisième place, un dessinateur qui ne cesse de charmer et de surprendre par les thèmes qu'il aborde, par son approche graphique qui fait jaillir l'intensité et l'émotion grâce au noir et blanc et à un trait « rough ». Le Rêve de Meteor Slim (Sarbacane) de F. Duchazeau est aussi un bel objet, un album au format particulier, qui sort de l'ordinaire, ce qui ajoute à son attrait.
Les lauréats des années précédentes :
La compétition Meilleures couleurs se traduit traditionnellement par une opposition entre couleurs directes et mise en couleurs. Le millésime 2008 s'est traduit par un match serré gagné par Ch. De Metter pour Shutter island (Casterman) face à B. Tillier et son Bois des vierges (Robert Laffont). Ambiance glauque et abondance de teintes marron pour un roman noir d'un côté, ambiances plus lumineuses, tantôt chaudes, tantôt glacées pour un conte historique de l'autre. Des genres, des styles, des techniques différents au service d'histoires qui le sont tout autant. A quelques milles, le travail de J-D Pendanx, habitué des honneurs bdgestistes, sur Jéronimus (Futuropolis).
Les lauréats des années précédentes :
Comme l'an passé, la catégorie distinguant les découvertes de l'année a donné lieu à un coude à coude acharné. D'un côté Dog et moi de Th. Plus, graphiste confirmé, qui signe un road movie exotique et baigné dans de magnifiques couleurs informatiques qui ont fait chavirer plus d'un lecteur convaincu d'y voir de la « matière », organique et chaude. De l'autre, Pico Bogue de D. Roques et A. Dormal qui mettent en scène un jeune gamin à la tignasse en folie, futé, prompt à dégainer les bons mots pour retourner les situations à son avantage. Un trio d'auteurs qu'on souhaite voir au plus vite franchir le cap du second album pour une confirmation de ces jolies promesses.
A la troisième place, le surprenant Légendes de la garde de D Petersen et son petit monde, riche et capable de s'adresser à tous les publics, parent du conte et du livre illustré tout en appartenant à la bande dessinée, large domaine aux contours extensibles.
Les lauréats des années précédentes :
Patience et longueur de temps... Après avoir échoué deux années consécutives sur la méritoire deuxième marché du podium Jeunesse, Seuls de F. Vehlmann et B. Gazzotti s'empare du trophée à l'occasion de la sortie du troisième tome des aventures des gamins abandonnés dans un environnement hostile et à première vue désert. Une fois encore, la série réserve quelques effets chocs au jeune public auquel elle est en priorité destinée. Au point de se demander si elle n'opère pas progressivement sa mue pour mieux conquérir une cible plus adulte. Efficace en tout état de cause.
Légendes de la garde, présenté dans la rubrique précédente, partage également cette particularité de se prêter à la « lecture accompagnée » si l'on veut ouvrir l'accès de ces récits aux plus jeunes dans les meilleures conditions possibles. Signe des temps ou simple biais induit par le fait que ce sont des adultes qui votent et non le cœur de cible des albums Jeunesse ? Probablement un peu des deux, mais les gamins aiment autant être charmés que trembler.
En bonne alternative, la petite Zarla, petit bout de guerrière rigolote, vient adoucir la note et prouve qu'il reste une place pour les séries amusantes avec des animaux (y compris s'ils appartiennent à la race des molosses, redoutables et effrayants à l'occasion).
Les lauréats des années précédentes :
La couverture de Ghost money (Dargaud) s'est instantanément imposée au regard de tous, en librairie comme dans la sélection. Admirable de sobriété, proposant une composition originale alliant sophistication en matière d'angle et beauté glacée, son efficacité et son pouvoir de séduction invitent immanquablement à feuilleter l'album. Irrésistible, au point de laisser ses concurrents du moment à une confortable distance.
Deux westerns modernes l'accompagnent. Pour le 1er tome de Junk (Milan), Brüno a abattu la carte de la référence en jouant avec l'affiche du légendaire Rio Bravo et en y imprimant son style. De telle sorte qu'elle porte sa signature comme un nez au milieu de la figure avant d'être seulement une reprise ou un hommage très appuyé. La jaquette de Billy Wild (Akileos) a valu sa deuxième citation à G. Griffon dans cet exercice. Pas de fioriture, le ton et la « couleur » du récit sont annoncés. De quoi faire saliver les amateurs du volet précédent, de quoi intriguer les autres. Mission accomplie.
Les lauréats des années précédentes :
Quelques rappels à propos des BDGest'Art :
Du 18 décembre 2008 au 4 janvier 2009, bdgest.com a organisé ses traditionnels BDGest’Art. Pour la 6ème année consécutive, les habitués du site (47.500 inscrits début janvier 2009) ont été invités à élire leurs favoris dans le cadre de 7 catégories.
Les catégories
O Album
O Scénario
O Dessin
O Couleurs (mise en couleurs / couleurs directes)
O 1er album
O Album Jeunesse
O Couverture
Une présélection en amont
Pour chaque catégorie, un Jury a établi une présélection de 10 titres maximum publiés en 2008 qui vont être soumis au vote du public. Ce Jury est composé de treize membres inscrits sur le site parmi lesquels on trouve cette année les administrateurs du site, un journaliste, des chroniqueurs réguliers, un libraire et des amateurs éclairés, tous gros lecteurs de bandes dessinées.
Précisions :
Un album ne peut cumuler des citations dans les catégories suivantes : Album, Scénario et Dessin.
Pour la catégorie 1er album, il doit s’agir de la première œuvre publiée pour l’un des auteurs.
Qui participe au vote ?
Pour participer, il suffisait d'être un visiteur enregistré sur le site BDGest.com au moment de l’ouverture du vote, c'est-à-dire le 18 décembre 2008.