Javi, un adolescent de 16 ans, a quitté l'école pour devenir une petite frappe qui monnaye ses services à des étudiants : retrouver des objets volés, casser quelques nez à l'occasion...
Durant cette même période, Jorge arrive en ville pour travailler dans une menuiserie industrielle. C'est une personne triste et taciturne, au passé mystérieux.
(...)
J'avais beaucoup apprécié la dernière œuvre de Nadar,
Le monde à tes pieds, qui m'a fait découvrir l'auteur, au point que j'ai commandé à mon libraire sa première œuvre parue deux ans plutôt, malgré les 29 € de ce gros pavé passé visiblement totalement inaperçu à sa sortie, en tout cas ici. Il est des auteurs comme ça dont on sait par avance qu'ils font déjà partie des grands, qu'ils ont ça dans le sang, des conteurs nés...
Papier froissé ne m'a pas déçu, bien au contraire. J'irais même jusqu'à penser que cette œuvre est encore plus forte tant sa maitrise totale, sa cohérence et sa construction sont de haut vol. Un scénario écrit de main de maître qui happe le lecteur, délivrant ses informations au fil des pages, au point qu'il est difficile de ne pas avoir envie d'aller au bout malgré les presque 400 pages et de trouver le temps nécessaire pour achever cette histoire. J'ai mis 150 pages à comprendre la relation entre certains personnages, je n'en dis pas plus pour ne pas divulguer la talentueuse construction du récit. Tout fait sens en tout cas. Jusqu'aux pages qui illustrent chaque chapitre. Tout se dévoile et s'imbrique au fur et à mesure, les histoires parallèles étant intelligemment entre-mêlées sans jamais perdre le lecteur. Enfin si mais il ne se perd dans le récit que pour mieux s'y retrouver et c'est ce qui fait toute la force et l'intelligence de sa construction.
Les personnages dépeints sont attachants malgré leur hermétisme. Ils ne délivrent pas leur intimité d'emblée. En observateur silencieux de leur vie le lecteur comprend petit à petit qui ils sont. Même les seconds rôles sont bien écrits et intéressants. Réussissant à retranscrire l'humanité de chacun avec véracité et avec leurs valeurs et modes de fonctionnement propres, Nadar sait décidément créer un univers et le rendre crédible, vivant et captivant.
A la fois tranches de vie, récit intimiste, on peut aussi tirer de Papier froissé des réflexions sur la vie, la destinée, le temps qui passe, les actes et les choix que l'on fait. Un peu à la manière de Les équinoxes de Pedrosa.
Le dessin est plus quelconque que l'histoire et l'écriture du scénario mais les visages et les expressions réussis traduisent bien leurs émotions, leur état intérieur, élément capital dans tout récit, encore plus dans ce type de récit.
18/20