Shazam !, volume 1, scénario de Geoff Johns, dessins de Gary Frank, DC Comics, 2013.
Ce recueil regroupe les histoires annexes de Justice League 7 à 11, Justice League 0 et Justice League 14 à 17.
J'étais très sceptique quant à la pertinence de conserver ce personnage qui symbolise la pureté et la naïveté de l'Age d'or des comics dans le monde particulièrement cynique de New 52. Qu'allait devenir Billy Batson, Black Adam, Sivana, le Wizard, Mary Marvel ?
Heureusement, Johns connaît fort bien la Shazam family. Il l'a fait (re)vivre dans son run admirable sur la JSA. Sa présence en tant que scénariste laissait présager de belles choses dans ce Shazam !. Qu'en est-il, au final ?
Philadelphie de nos jours. Billy Batson est un jeune orphelin ballotté entre différentes familles d'accueil. Rebelle, cynique, préférant la vie de la rue et vivre de vols et de combines plutot que de rester dans des familles d’accueils peu accueillantes, il ne compte que sur lui-même. Cependant, il déteste que des petites terreurs s'en prennent aux faibles, et il joue les casses-cous.
Les autorités finissent par le placer chez une famille comptant déjà de nombreux autres orphelins, dont Mary, Darla, Pedro, Freddy Freeman.
Billy repousse violemment leur amitié spontanée, il sera durement remis à sa place par Mary. Cependant, dès son premier jour de classe, il n'hésite pas à mettre une méchante raclée à deux gosses de riches qui prennent pour cible ce groupe d'orphelins. Ce qui suscite la colère du paternel de ces fils de riches, un individu aussi puissant que détestable...
Pendant ce temps, le Docteur Sivana cherche à prouver que la magie existe bien. En faisant des fouilles archéologiques, il réveille Black Adam, le premier Champion du Wizard enfermé par lui en raison de sa dangerosité...
Quand le sorcier à vent du retour de son ancien champion, il n'a d'autre choix que d'en choisir un autre. Par un concours de circonstances malheureux, Billy atterrit dans son palais, le Rocher de l’Eternité, où doivent être scellés les Sept pêchés capitaux ou plutôt devrait.
Billy est-il digne d'être le nouveau champion ? Pour ne pas créer un second Black Adam, le sorcier recherche un être totalement pur. Le magicien observe son âme et relève l’égoïsme, le cynisme, la dureté, les larcins commis par le jeune homme. Billy n'a rien d'un être vertueux...
Billy s’étonne de l'exigeance du mage et lui rétorque que la pureté n'existe pas (ou que ceux qui en font preuvent meurent jeunes, comme ses parents), il n'est guère étonnant qu'il ne trouve personne pour devenir son héraut. Lassé par le discours moralisateur du vieillard, Billy est prêt à partir...
Le magicien réfléchit et observe une nouvelle fois la psyché de Billy : si certes il est arrogant, impulsif, pénible, Billy a un bon fond : il éprouve le besoin irrépressible de protéger les plus faibles et n'aime pas faire de la peine aux autres. Alors pourquoi pas ? Il est toujours mieux qu'Adam. Le magicien lui confère alors ses pouvoirs et disparaît.
Devenu Shazam, Billy qui va retrouver Freddy Freeman, s'amuse follement dans la cité en détruisant la voiture du père des affreux de son collège où en frappant quelques criminels minables.
Mais cela n'a rien d'un jeu. Adam arrive. Il a bien l'intention de tuer le nouveau champion pour s'emparer de sa force, puis de prendre le contrôle du Rocher de l’Éternité, il est aidé de Sivana qui réveille les Sept Pêchés capitaux enfermés dans des corps d'humains. Billy est bien seul face à un guerrier impitoyable, ou tout du moins se croit-il seul, car sa nouvelle famille tient à lui, reste pour lui à comprendre que l'on peut s'attacher à quelqu'un sans arrières pensées...
Johns qui s'empêtre dans ses différentes Justice League réussit, ici, a relancer avec une grande pertinence Shazam.
Si l'on retrouve les éléments fondateurs du mythe (le magicien, le roc, le tigre, le môme orphelin qui déboule avec un métro magique, etc.), Johns supprime les éléments les plus enfantins et essaie de proposer un Billy Batson réaliste . Ballotté de familles en familles (c'est un peu de sa faute, comprenons-nous vite), cela lui a laissé des séquelles : il n'a confiance en personne et est profondément égoïste, il est souvent un vrai appeau à gifles. Ne comptez donc pas entendre de sa bouche les fameux Holly Molley et cie !
Heureusement pour lui, ses « frères » et « sœurs » n'hésiteront pas à le remettre à sa place ou, dans le cas de Freddy, à l'encourager dans ses travers... Mary joue le rôle de la grande sœur autoritaire avec un cœur d'or. Darla est une petite fille naïve qui ne comprend pas le mal : elle énerve Billy qui ne peut cependant s’empêcher de la protéger dès qu'elle est en défaut. Pedro est complexé par son embonpoint. Freddy, est handicapé. Tous ces gosses, ont eu des parcours difficiles (les parents de Mary sont comme ceux de Billy décédés, ceux de Freddy dorment en prison et ceux de Darla l'ont abandonnée bébé...), ils peuvent néanmoins compter sur leurs parents adoptifs aimants et désintéressés.
Gary Frank est assurément au sommet de sa forme et la lutte entre Shazam et Adam est spectaculaire.
Johns, comme dans son précédent run sur JSA, donne beaucoup d'épaisseur à Black Adam . Il a certes commis des choses horribles et impardonnables, mais il avait un but : protéger son pays. Comme Billy il méprise l’oppression mais sa réponse est beaucoup plus expéditive.
Johns conserve cette bonne idée qui fait qu''Adam ressemble plus qu'on ne pourrait le croire à Shazam. Billy pourrait lui aussi basculer et devenir Adam. Adam, lui, pourrait redevenir quelqu'un comme Billy... Il manqua de le faire dans 52 quand il épousa Isis... Cela rend leur combat d'autant plus dramatique : les deux opposants sont acharnés, mais il se respectent.
On ressort de ce premier volume vraiment satisfait. Sivana, le Wizard, Adam, Tawny, la marvel family sont redéfinis avec brio, on attend déjà la suite dans laquelle le docteur Sivana jouera le rôle principal.