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'épinard de Yukiko, c'est la rencontre entre Frédéric Boilet, mangaka Français résidant à Yokohama, et Yukiko Hashimoto, une jeune Japonaise, un portrait de Yukiko par un homme épris, incapable de dessiner autre chose qu'elle. Yukiko aime quelqu'un d'autre mais en attendant que cette personne ne se manifeste, tous deux vont vivre au jour le jour une parenthèse amoureuse, une histoire éphémère mais tendre, et intense.
Ce livre est une véritable ode à Yukiko. Elle est omniprésente, croquée dans ses moindres faits et gestes, qu'ils soient futiles ou non, intimes ou non. Nous voyons Yukiko magnifiée par le regard de Boilet, qui se pose plus en spectateur qu'en acteur de son livre. Il n'en est pas pour autant un voyeur, Yukiko évolue sous son regard et sa plume tendre, parfois drôle, toujours touchante et juste. Le trait de Boilet, plutôt réaliste tout en présentant des caractéristiques proches de l'impressionnisme, donne aux planches un aspect proche du rêve, grâce notamment à des décors et des contours de personnages parfois flous, cotonneux. Cet aspect est renforcé par un rythme lent, et par le format manga, plus adapté pour ce type de travail que notre bon vieux 46 planches franco-belge.
Boilet joue beaucoup avec les mots dans son livre, se moque de son japonais oral, et de ses difficultés à prononcer les "h" qui sont à l'origine de beaucoup de confusions. Le titre de l'album est d'ailleurs une conséquence de ces confusions. Mais Boilet va plus loin que l'aspect purement anecdotique de ces difficultés à prononcer les "h", il transforme cela en un outil, et l'utilise pour renforcer l'idée que lui et Yukiko sont dans leur bulle, mais qu'ils en sortiront un jour. Ce jeu sur les "h" devient un témoin de la stérilité de leur relation, un compte à rebours inexorable, et insuffle une douce mélancolie au livre, qui s'ajoute et donne de la profondeur au ton plutôt léger et insouciant qui règne dans le reste de l'album.
On entre dans L'épinard de Yukiko comme on se blottit dans les bras d'un être aimé: on dirait que le temps n'existe plus, ni pour nous ni pour Frédéric Boilet et Yukiko, on se sent bien. Et la dernière page venue, on referme le livre avec un sourire aux lèvres et le sentiment d'avoir lu quelque chose d'exceptionnel. Boilet ne raconte qu'une histoire d'amour parmi tant d'autres, mais il met tellement de lui et de Yukiko dans son livre qu'ils finissent par vivre devant nos yeux, et dans notre imagination.
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