Appartement Tome 1

K oh-hyuk est un jeune coréen de 29 ans, célibataire, dont l’essentiel des journées consiste à rédiger en vain des CV depuis son appartement au sommet d’un building. N’ayant rien d’autre à faire, il finit par s’intéresser au comportement de ses voisins de la tour d’en face et remarque un jour un étrange phénomène : à 21h56, une grande partie des lumières s’éteignent simultanément. Il n’y prêterait pas plus d’attention s’il ne remarquait la même chose, à la même heure, quelques jours plus tard. Intrigué, il commence à se renseigner et remarque quelques décès suspects dans ce même immeuble…

Les premières pages évoquent irrésistiblement Hitchcock et en particulier Fenêtre sur cour : dans les deux cas, un célibataire désœuvré découvre un mystère en observant ses voisins d’en face. Un concept très simple qui permet de faire monter le suspense à partir d’un décor minimaliste, en laissant le lecteur imaginer ce qu’on ne lui montre pas. Personnages volontairement banals, aucune action, dialogues rares et voix off omniprésente qui permet l’identification aux protagonistes qui cherchent à comprendre ce qu’ils voient. Avec trois bouts de ficelle scénaristique, et un univers graphique original et particulièrement approprié, Kang Full nous emmène avec une simplicité déconcertante aux 150 pages sans qu’on ait eu ni le temps de dire ouf, ni l’impression que l’intrigue ait réellement avancé.

Le dessin ? Trait simple à mi-chemin entre le manga classique et Matt Groening (les Simpsons) et couleurs douces pour des pages de deux cases sans cadre, dans un style qu’on imagine plutôt pour des strips de deux pages. Cette simplicité est finalement très efficace, car elle fait écho au minimalisme de l’intrigue et contribue à la fluidité de la lecture, primordiale pour la montée en puissance voulue par l’auteur.

Mais là ou le cinéaste anglais savait faire court, quitte à terminer sur un rebondissement un peu facile au paroxysme de la tension, le suspense si brillamment instauré finit par s’étioler avant que l’intrigue ne gagne réellement en profondeur, avec l’apparition du fantastique sur la fin de ce premier volet. Construction confuse avec des allers et retours temporels pas toujours explicites, redondance lassante des événements quand on les revit par des personnages nouveaux : Kang Full en fait sans doute un peu trop et retarde le moment de faire basculer son histoire.

C’est donc avec une légère déception qu’on referme ce premier volume, en n’attendant pas la suite avec autant d’impatience que le laissait présager l’entrée en matière. Mais ne boudons pas notre plaisir : Appartement propose un suspense et un découpage original qui demeurent trop rares pour qu’on passe à côté. La deuxième partie de ce diptyque est annoncée pour fin février.