L
ycéenne, Orange se questionne sur son devenir et sa place dans la société. Elle s’apprête à faire le grand saut du suicide quand une bouteille se brise à ses pieds. Elle découvre Dashu, perché sur le toit, s’abrutissant dans l’alcool. Artiste abandonné par l’inspiration, il est incapable de supporter le monde qui l’entoure. Des liens se tissent entre ces deux (mal-) êtres : elle voulant qu’il la remarque, lui se laissant peu à peu envahir par elle et ses idées.
Benjamin s’était fait remarqué avec son Remember paru chez Xiao Pan en février 2006. Le même éditeur publie un nouveau titre de cet auteur : Orange. Comme le précédent, ce one-shot offre une histoire à fleur de peau, à travers laquelle perce la sensibilité de l’artiste. Jugé trop « déprimant », l’album avait été refusé par son éditeur chinois. Et sans conteste, l’histoire présente est tragique et noire.
Le drame s’inscrit dès les premières pages où la mort plane. Les interrogations existentielles de l’héroïne, ses envies de suicide, son désir d’exister pour quelqu’un montrent le vide et la vanité de la vie d’une certaine jeunesse actuelle. Le personnage masculin, son malaise, sa décrépitude évoquent la tourmente de l’artiste teintée de délire. L’histoire entière conduit à un dénouement inexorable qui, s’il est attendu et préparé, n’en est pas moins brutal. Les mots des dernières pages pèsent alors douloureusement. Le lecteur ne peut que se sentir touché par ces êtres écorchés qui flirtent aux confins de la folie. Et il se demande qu’elle est la part de vrai de ce récit, car Benjamin laisse entendre dans la postface qu’il pourrait être l’artiste dont s’éprend Orange. Quoi qu’il en soit, il en ressort que l’auteur livre une nouvelle fois une histoire très personnelle mettant à nu une personnalité torturée à l’extrême.
Graphiquement, Orange est un régal pour les yeux. Benjamin y confirme son talent d’illustrateur et sa maîtrise de la palette graphique. La couverture en est un bel exemple. Tout est mouvements et couleurs dans l’album. La dominante de bleus et de verts froids évoque le milieu urbain, la grisaille ambiante comme celle des cœurs, tandis que les quelques rouge-orangés apportent des touches de vie et de lumière. Les gros plans sur les visages des personnages ou certaines de leurs attitudes et de leurs expressions les rendent particulièrement vivants.
Manhua de qualité, Orange ne laisse pas indifférent. Lisez-le.
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» One Day
Je suis tombé fan de Benjamin. Ses dessins sont magnifiques mais ils sont aussi torturés qu il ne l est. On doit froler l autobiographie dans cette histoire : mal être de la jeunesse chinoise entre modernité et passé de la ville et de la pensée. Pas toujours facile a lire, retour en arriere nécessaire des fois. Mais une satisfaction d avoir réussi a suivre l auteur dans ce qu il avait a nous raconter pendant cette heure.