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ls sont cinq parmi mille et un conteurs et ils ont trois ans pour trouver le conte qui rendra riche et célèbre celui qui gagnera le concours organisé par le Calife de Bagdad. Attention, ils n'ont pas le droit à l'erreur car celui qui finira dernier subira le supplice du pal ! Il y a Nazim le populaire, Tarek le meilleur conteur, qui "pisse dans la bouche du Calife", Anouar le vieux maître de Tarek et Wahid la féministe qui se nomme en réalité Wahida, tous réunis autour de Ahmed, le fils du Calife, qui souhaite apprendre l'art du conte à leur contact. Ils vont parcourir le monde pour nourrir leur imaginaire de vieilles et fantastiques histoires, non sans avoir consulté la meilleure devineresse de la ville pour leur plus grand malheur. Meurtre, mariage, défaites et victoires seront au rendez-vous.
Velhmann et Duchazeau sont passé maîtres dans l'art du récit humaniste, ensemble (La nuit de l'Inca, Dieu qui pue, Dieu qui pète) ou en collaboration avec d'autres auteurs chacun de leur coté (Le marquis d'Anaon, Gilgamesh, …). Leurs cinq conteurs rassemblent un éventail assez exhaustif des qualités et défauts qui font de leurs personnages des êtres attachants. Le bougon philosophe, le gentil colosse, le garçon perspicace, le rebelle charmeur et la charmante révoltée, tous concourent à faire des Cinq conteurs de Bagdad une belle fable. Bagdad, ville synonyme de contraste entre grandeur du passé et funeste présent (les auteurs ne manquent d'ailleurs pas de le faire savoureusement remarquer) et génératrice de contes et légendes. Les choix de lieu ou d'environnement et des thèmes explorés, souvent à contre-pied de la tendance du moment, renforce l'impression d'être en présence d'une bande dessinée à part, pour peu que l'on soit disposé à succomber aux charmes du moyen-orient et aux paroles enjôleuses.
Velhmann et Duchazeau appartiennent à une nouvelle génération qui participe à l'évolution de la bande dessinée, héritiers des déjà "vieux" Blain et autres Sfar. Ils font preuve de quelques prouesses narratives, comme cet arbre en pleine page où des oiseaux expliquent les différentes versions de la noyade d'un naufragé, ou encore l'habile exercice de restitution de l'histoire qui gagne le concours. La mise en scène est servie par un dessin habile, simple et se focalisant sur les personnages et leurs expressions, sans pour cela délaisser totalement les décors lorsque c'est utile. Le feu d'artifice dans le ciel d'une ville indienne en est l'illustration parfaite et éblouissante. Le tout est rehaussé de couleurs chaudes retranscrivant particulièrement bien les différentes ambiances du récit.
L'art du conte ainsi présenté ne peut que toucher le lecteur prêt à vagabonder au pays des mille et une nuits. Accompagner ces cinq conteurs est un voyage fait de rêves, de découvertes et d'émerveillement sur les ressorts de l'âme humaine.
Je ne nie pas les qualités évidentes de cet album, je ne suis juste pas sensible à ce genre de récit.
J’ai trouvé le thème et les dénonciations voilées un peu vains, je n’ai pas tout compris peut être ; pour les dessins, je ne suis pas fan de Duchazeau du tout.
[SPOILER SPOILER]
Je n’ai pas compris non plus pourquoi la fin était différente de ce qui était annoncé par la voyante, alors que tout le reste avait été respecté.
Cela m'a été particulièrement difficile de juger cet album. Ce n'est pas franchement bon mais pas aussi mauvais que cela. Il peut apparaître déroutant dans la mesure où on connaît non seulement la fin dès le début de cette aventure mais également toutes les péripéties que vont vivre les personnages avec des fortunes diverses au gré du destin. Par conséquent, il ne faut pas s'attendre à du suspense.
J'aime pas généralement les albums à terroir, genre double lecture. Or, ici, il s'agit bien de cela. C'est un conte qui parle d'histoires à raconter et de la manière dont on peut les raconter pour apprécier le talent d'un auteur. C'est très subtil car la bd commerciale n'est pas épargnée.
Cette fable à la fois poétique et dépaysante peut être intéressante à bien des égards. L'intrigue alléchante du début n'est qu'un prétexte pour explorer l'âme humaine au cours d'un voyage initiatique. Etes-vous prêt pour un tel voyage ?
Excellent !
Les auteurs ont réussi la prouesse de faire une mise en abîme intelligente et subtile : Ils inventent un conte qui raconte l’histoire d’un conte… et rend un hommage inspiré à l’art ancestrale de la tradition orale avec une grande maitrise graphique et narrative.
Un ton accrocheur, des personnages truculents, du mystère, de l’ironie, de la réflexion… le tout dans des décors magnifiques ! Vehlman et Duchazeau, tous deux parfaitement en phase, ont rarement été aussi bons.
Le narrateur qui s’adresse avec malice au lecteur rajoute une dimension immersive précieuse. Sa dernière parole « Il est temps pour vous de fermer ce livre et d’ouvrir les yeux. Une autre histoire commence quelque part, près de vous »* résonne comme un conseil bienveillant et m’a fait naitre un sourire complice.
J’ai dû le lire 7 ou 8 fois avec le même plaisir, et ça n’a pas pris la moindre ride depuis presque 15 ans ! Une très belle BD, fine et profonde. A lire absolument
*Dans la nouvelle édition uniquement
Cet étonnant album est ressorti cette année chez Dargaud avec une nouvelle couverture, ce qui m'a permis (grâce à la bibliothèque) de découvrir une très belle histoire et un illustrateur à surveiller de très près car il est vraiment très très subtile...
Un jour le calife de Bagdad organisa un grand concours de contes. Au vainqueur plus de richesses qu'il n'en pourrait rêver, au plus mauvais l'exécution, car l'art noble ne peut être abaissé... Les meilleurs narrateurs du pays s'y inscrirent et parmi eux, cinq personnages qui les dépassaient tous: alors qu'une voyante leur prédit leur avenir ils seront amenés à un voyage au fond du monde afin de constituer le conte ultime...
Ce qui fait une bonne histoire ce sont des personnages. Ce qui fait une bonne histoire ce sont aussi des paysages. Ce qui fait une bonne histoire c'est de l'exotisme, de l'aventure et un soupçon de magie... Velhmann connaît ses gammes. Si son histoire des mille et une nuits revêt un côté un peu hermétique (comme souvent dans les contes!), elle suit une progression linéaire et surtout une construction très audacieuse en jouant avec le spectateur en intégrant le rite du récit oral dans la BD. Ainsi l'album s'ouvre et se termine (dans un sublime noir et blanc estompé) par un narrateur qui va ouvrir et refermer son histoire que l'on tient entre les mains (ce n'est pas artificiel, vous verrez, c'est comme dans les films Marvel, faut rester jusqu'au bout!). Puis, dans cette histoire entrecoupée et plusieurs récits (on aurait aimé une petite audace de mise en poupées russes...), moultes réflexions interviennent sur la notion de public, sur la raison d'être du conte ou encore sur la destinée. Les récits ne sont alors pas tous passionnants (j'avoue être resté stoïque devant la double page de l'arbre aux oiseaux) mais la richesse du quintet permet de compenser cela.
Dès la présentation (rapide) on se passionne pour ces cinq conteurs et pour les dialogues pleins d'intelligence et de mauvais esprit, en particulier l'excellent Anouar, vieil ermite anarchiste plus prompt à insulter son prochain qu'à émettre des tirades de sagesse. Car ce que recherche Velhmann au sein d'un cadre très formaté, c'est la surprise du lecteur. Dès les premières pages la voyante explique aux personnages et au lecteur les grandes lignes du voyage, déflorant le récit et quelques mystères. Ce voyage initiatique doit se passer au-delà des apparences. Alors inévitablement la chute n'est que l'aboutissement logique de la trame et ne surprendra pas le lecteur, amenant une petite déception...
Pourtant cet album est doté d'un trait comme je n'en avais jamais vu (ou si, dans une variante, chez Edouard Cour sur Heraklès): d'un premier aspect gribouilli se cache sous la crysalide un dessin d'une finesse impressionnante. Je suis plutôt fasciné par les illustrateurs-encreurs comme Lauffray, Roger, ou Nicolas Siner, mais force est de reconnaître la capacité de ces très fines hachures à donner une texture, une vitesse et un dynamisme impressionnants au dessin. En une calligraphie aérienne Duchazeau nous dresse un paysage de l'Inde, De Grèce ou de montagnes. Une ombre crée une expression précise qui appuie l'humour très spécial de l'album. En ressort un album très élégant dont l'harmonie entre texte, dessin et couleurs force le respect.
Je vous invite donc à écouter ce conte en suivant ces personnages hauts en couleurs et sans vous soucier plus que cela du sens de l'histoire, sur le fil de la plume de Duchazeau. Une très belle découverte.
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2018/04/20/les-cinq-voleurs-de-bagdad
Histoire prenante qui met en abîme l'art du conte, dans un décor oriental à la façon Mille et une nuits. Personnages variés et intrigants, une belle aventure !
J'ai souvent constaté que pour qu'une bd soit majoritairement reconnu du grand public et louangée, il est indispensable que le scenario et le dessin soient impeccables ! Malheureusement, ce n'est pas le cas avec celle-ci car si le scenario est excellent, le dessin en revanche ne l'est pas... J'aurais vraiment voulu donner un 5/5 à cette bd tellement j'ai pris de plaisir à lire cette histoire !
Par contre, au niveau du scenario, je ne comprend pas pourquoi Tarek s'est marié avec Wahida ? Ils ne semblaient pas particulièrement plus amoureux l'un de l'autre qu'au début de l'histoire..
Voici une histoire plutôt originale, celle d’un groupe de cinq conteurs qui traverseront le monde à la recherche d'idées, d’histoires extraordinaires dans le but de créer une histoire parfaite qui sera racontée au calife de Bagdad, celui-ci étant un passionné de contes.
Après quelques pages, on sait comment l'aventure va plus ou moins se dérouler mais on a quand même envie de savoir comment les auteurs vont s’y prendre.
Le récit est pas mal, ça change mais manque un peu de surprise et de rythme. L’épilogue est assez réussi et pas trop prévisible.
Concernant les dessins, j’avoue que ce n’est pas le style que je préfère au premier coup d’œil mais au final, il est stylisé et bien adapté au scénario. Ca vaut le coup d’être lu, quant à l'achat c'est autre chose (ce n'est que mon avis)
Quelle claque...La magie opère dès les premières cases...
Si vous voulez vous faire plaisir n'hésitez pas.
Le dessin colle parfaitement à la magie des contes.
Tout simplement une œuvre d'art.
5/5
Retrouvailles avec les contes de notre enfance en version BD, ce livre est visuellement magnifique.
Une magie tranquille se dégage au fil des pages et on se laisse porter sans presque le remarquer dans la féérie de ce conte.
Une BD pour tous, petits et grands, une aventure extraordinaire et colorée à vivre et revivre.
Je suis une grande fan de Velhmann et de son ton jouissif et cynique. Les cinq conteurs n'est pas un mauvais album mais n'est pas son meilleur non plus. Les histoires se suivent, un peu décousues mais pleines de bon sens. Pour voir du Velhmann à son meilleur, n'oubliez surtout pas de croiser les "Green Manor"!
Très joli one shot au scénario et au background original et intéressant. Le dessin et les couleurs sont agréables. La sensation de récit à double lecture et de mise en abyme est très amusante et pousse à la relecture. Du tout bon pour moi donc...
Une BD visuellement splendide tout en crayonés ; il faut voir les toutes premières pages avec le narrateur dans l'ombre.
L'histoire aurait cependant méritée d'etre un peu plus poussée mais elle reste tout à fait honnête et très originale.
Merveille de la BD.
Un livre qui plaira énormément à ceux qui, de près ou de loin, se sont intéressés à la narration. Et à beaucoup d'autres aussi. Mais pas à tout le monde. Un peu comme la première histoire de Tarek, finalement...
Le dessin, qui pourrait sembler brouillon au premier abord est en réalité très juste, très humain. Il colle parfaitement aux ambiances ainsi qu'à l'humeur, aux expressions de nos conteurs.
Reste que c'est sans conteste l'histoire qui rend ce one-shot véritablement unique. Une histoire qui parle d'histoires, bien sûr, mais qui parle surtout de nous, de nos relations les uns aux autres. Une histoire qui parle culture, de jugement et de justice. Subtilement, sans jamais trop se prendre au sérieux, sans jamais tomber dans l'évidence.
Voici une oeuvre à ne pas manquer et à offrir à tous ceux qui n'ont pas encore compris que la BD est, aussi, un art.