1977, la France des années de l'après choc pétrolier. Une vague d'attentats sans lien apparent secoue Paris. La police est sur les dents, les élections législatives approchent avec son cortège d'incertitudes et d'hésitations. Qui sont ces chats bottés qui sèment la terreur ? Peu importe, il faut les faire taire à tout prix car la chienlit ne doit pas prendre le pas sur l'ordre. C'est l'heure pour les barbouzes de rentrer en scène.
De nos jours, rares sont les albums choisissant pour décor la seconde moitié des années 70, les auteurs préférant souvent l'atmosphère plus enjouée de l'après-guerre. A part Tardi reprenant récemment Le petit bleu de la côte ouest de Manchette, La nuits des chats bottés est peut être le seul album traitant de la morosité ambiante des années Giscard. Et coïncidence, c'est également l'adaptation d'un polar mais de Frédéric H. Fajardie cette fois-ci, un autre auteur de polar.
Ecrit en 1977, devenu culte depuis, traitant de l'anarchisme mais également du romantisme fou, "La nuit des chats bottés" était fait pour devenir un film ou une bande dessinée. Une ambiance explosive et une alternance de scènes d'actions et de romantisme désuet mais nécessaires à la justification d'actes terroristes, que demander de plus pour assurer un rythme haletant. Presque trente ans séparent l'adaptation et la parution du roman, et si ce n'est les décors, les voitures, etc… tout semble bien d'actualité : inégalités sociales, mal-vivre, terrorisme, spectre de l'insécurité devenant programme électoraliste, tout y est. Rien n'aurait changé en trois décennies ?
D'un point de vue graphique, Boris Beuzeulin colle parfaitement à la période. Le trait est proche du réalisme de Vance dans sa période Bob Morane, les visages légèrement carrés avec les bras et les jambes un peu raides et le découpage très classique. Son album précédent, Stabat mater , avait montré son talent, ici, la couleur en moins, il s'inscrit dans un contexte moins sombre mais peut-être plus adapté au sujet.
Un mélange de polar, de romantisme, de politique et de révolution. Un baroud d'honneur pour les beaux yeux d'une fille d'ouvrier teinté d'anarchisme.
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C'est l'histoire de deux personnes qui font tout sauter sur leur passage pour assouvir une vengeance contre la société. Ils étaient pourtant issus de l'armée, garant des institutions contre les menaces extérieures. Là où on pourrait y voir une sorte d'appel à la liberté contre un dégoût de l'idéologie dominante, je n'y vois que du terrorisme hautement condamnable.
On greffe une petite histoire d'amour et une rivalité avec un commissaire blasé pour jouer au jeu du chat et de la souris. Franchement pathétique cette succession d'explosion de nos plus beaux monuments nationaux ! Pour ceux qui rêvent du grand soir ! Une oeuvre anti-patriotique assurément ! On peut avoir la haine du système mais la manifester de différentes manières. La destruction, ce n'est pas mon truc. Je ne cautionne pas cette oeuvre, voilà tout !
Mon avis est relativement mitigé. Pas grand chose à redire sur le dessin, il me plaît bien. Le déroulement du roman me semble suivi (lu il y a une dizaine d'année).
Maintenant, le problème d'une succession d'actes de bravoure et d'explosions est bien réel même si moins présent dans la seconde partie... Certes, il y en a dans le roman, mais ce qui fait la force de ce roman, c'est le charisme des personnages, or un seul me rappelle au bon vieux temps, c'est Nollet... Là, la crédibilité du scénario en souffre terriblement, j'ai bien du mal à croire en cette croisade et encore plus en ses motivations...
C'était un pari difficile qu'a tenté Beuzelin, et rien que pour cela, je lui tire mon chapeau. J'espère qu'il réessayera avec d'autres Fajardie, peut-être que "la théorie du 1%" se prête mieux à une adaptation BD...
Pour ceux qui ont aimé le roman du même nom de Fajardie... je vous recommande cette BD.
Pour tous les autres qui rêvent d'un Grand Soir, foncez ! C'est un véritable bonheur.