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lankets, récit de près de 600 planches aborde l'enfance, la nature, le fondamentalisme religieux et les incertitudes de l'amour dans l'Amérique des années 80/90. On rencontre Craig tombant amoureux de Raina mais aussi la violence, le racisme et l'intolérance dans une petite ville du Wisconsin.
A la lecture de Blankets on comprend pourquoi le travail de Craig Thompson fut remarqué par Art Spiegelman et encensé par la presse aux Etats-Unis. Comparé à juste titre à Maus pour son aspect autobiographique, on ne peut s'empêcher d'y voir également une forte ressemblance dans le mode de narration utilisé. Sans fausse pudeur, l'auteur nous parle de son enfance jalonnée de joies et de traumatismes aussi, de la complicité entre frères, de l'adolescence difficile et enfin du passage à l'âge adulte bercé de désillusions et d'une prise de conscience salvatrice pour son avenir.
Résumé ainsi on pourrait s'attendre à un récit rébarbatif, triste voire ennuyeux. Il n'en est rien ! Nous suivons le parcours de Craig, semé d'embûches (en particulier le regard des autres) et de récompenses (la jolie Raina), déroulant le fil de ses pensées et de ses doutes. Découvrant la passion amoureuse et la beauté de la nature, s'affranchissant de son éducation ultra-catholique et transformant le tout en formidable énergie créatrice entièrement canalisée vers son amour du dessin. Sans jamais tomber dans le pathétique ni le démonstratif, Craig Thompson utilise les mots justes qui touchent par leur sensibilité, leur vérité ou leur vécu.
Dans Blankets, critique acerbe de l'Amérique profonde puritaine à ses heures, Craig Thompson ne rejette jamais la responsabilité de ses maux sur son éducation ou sa religion. Il cherche tout au contraire à s'appuyer sur leur origine et à en utiliser les contradictions pour trouver une réponses à ses doutes.
Si l'influence d'Art Spiegelman est indéniable sur la narration graphiquement c'est en Europe qu'il faut chercher un lien de parenté. On ne peut s'empêcher de rapprocher son trait à celui de Blutch ou de Peeters (Frédérik pas Benoît). Même insistance sur les regards et les poses des personnages, même souci de la mise en scène de l'imaginaire et de l'expression des rêves. Associé à un découpage en osmose avec les ambiances changeantes, le dessin en N&B démontre toute la puissance du trait de Craig Thompson.
Il est bien sûr trop tôt pour parler de l'album de l'année, laissons passer encore quelques mois avant de nous prononcer mais Blankets occupera sans aucun doute une place du podium.
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