E
st-il encore besoin de présenter Osamu Tezuka ? Surnommé le "dieu du manga" par ses pairs, célébré à sa mort comme une superstar ou un dignitaire d’envergure, Tezuka a marqué de son empreinte l’ensemble de la création dessinée et animée japonaise. Et si toutes ses séries ne sont pas de purs chefs-d’œuvre, elles ont toutes ce petit quelque chose qui les distingue si aisément de tout autre manga.
I.L est un conte pour adulte, comme Tezuka les appréciait tant dans la seconde partie de sa carrière. C’est l’histoire d’un réalisateur sur le retour, dont l’ultime projet vient d’être refusé avec pertes et fracas par les producteurs, et qui se retrouve fauché et sans perspective d’avenir. Suite à une étrange rencontre, il découvre une immense maison soi-disant vide et à louer, dans laquelle il fait connaissance avec Alucard, personnage mystérieux qui lui propose un travail : mettre en scène la réalité. Et pour ce faire, il lui accorde les services d’une jeune fille dont le talent est de pouvoir prendre l’apparence de n’importe qui après un bref séjour dans son cercueil.
Mélangeant avec énergie des histoires de vampires et de substitution d’identités qui resurgiront parfois dans son œuvre (dans Vampire et Nanairo Inko, notamment), Tezuka développe une légende urbaine et mystique, bien inscrite dans son époque (les années 70, avec leurs manifestations étudiantes et leur drôle de cinéma indépendant), mais usant des codes narratifs qui ont fait la gloire de son auteur. Découpage serré, dialogues percutants, humour absurde et histoires à chute rythment ce volume inégal mais plaisant, le principal reproche que l’on pourrait lui faire étant d’oublier rapidement le postulat de départ pour s’enfermer dans un cycle d’historiettes sans grande envergure. Tragique et romantique, ce manga copieux (350 pages ou presque) se dévore malgré tout avec gourmandise, pour peu que l’on apprécie - ou que l'on supporte - le dessin de Tezuka, vieillot mais d’une indéniable efficacité.
Un livre un peu bancal par moments donc, mais d’une limpidité et d’une simplicité rafraichissante, comme souvent chez ce génie de la narration. Il est des œuvres, mineures dans certaines bibliographies, qui en illumineraient bien d'autres...
Je n'aurais sans doute pas dû commencer ma découverte de cet auteur par ce titre qui constitue une série de nouvelles qui n'avaient pas très bien marché commercialement parlant. Le coup de cœur n'a pas eu lieu car c'est un peu naïf et parfois maladroit.
En effet, les récits ne m'ont pas semblé pas être très cohérents. Par ailleurs, il y a indiscutablement une carence au niveau du graphisme car cet auteur ne sait pas dessiner les femmes (comme Manara par exemple).
Pour autant, je ne vais pas m'attacher à ce genre de détails car d'après ce que j'entends, nous sommes en présence d'un maître du manga japonais inattaquable sur le fond et la forme. Je continuerai donc mon exploration par d'autres titres qui seront peut-être plus abouti (en tout cas, je l'espère).