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oe Fitzgerald est mort. Alors qu'il honorait un ultime contrat, lui et Laura, l'amour de sa vie, ont été fauchés par des balles perdues. Les amoureux sont séparés pour l'éternité. En fait, peut-être pas, car un ange venu à sa rencontre lui propose un marché. En échange de quelques petites missions, il pourra revoir sa belle...
Scénariste star, Joe Michaël Straczynski rejoue très librement le mythe de d'Orphée dans Ten Grand. Démons et démiurges se chamaillent sur la Terre et utilisent les pauvres humains comme véhicules de leurs ambitions. Coincé au milieu de la bagarre, le héros ne cherche qu'à remplir sa part du contrat pour retrouver son âme sœur. De plus, comme toutes les cartes sont truquées, il doit parfois prendre les choses en main pour remettre de l'ordre au Paradis ou en Enfer. Sur le papier, rien de très nouveau, tant le cadre général de la série sent le déjà vu (Constantine, Sandman, etc.). Heureusement, il reste la manière. Straczynski s'amuse à jouer à Dashiell Hammett avec ce personnage désabusé qui se démène dans une société et un Au-delà en désintégration, où Charon en personne est en prise avec la dépression ! Même s'il utilise internet et un téléphone portable, Fitzgerald (le choix de ce patronyme n'est évidemment pas innocent) semble tout droit sorti d'un roman des années trente. Par contre, si les similitudes avec Gatsby ou Spade sont intéressantes, les intrigues restent très convenues et sans réelle profondeur psychologique.
Ben Templesmith et C.P. Smith se partagent la tâche d'illustrer ces pérégrinations fantastiques. Ces deux artistes, aux traits assez éloignés au demeurant, se rejoignent par une même approche globale de la composition. Celle-ci se caractérise par un travail extrême des couleurs et de la matière. Néanmoins, à force d'ajouter des effets de mouvements et de multiplier les superpositions et autres incrustations, le dessin en devient quasiment secondaire. Le résultat est impressionnant de technique, mais souvent écrasant d'un point de vue narratif. Au final, le jeu de surenchère graphique permanent sature l’œil et noie le récit dans un emballage clinquant plus proche de l'esthétique des jeux vidéos que de la bande dessinée.
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