L
e gouvernement des États-Unis va lancer un grand projet afin d'éradiquer le crime. L’émission d’ondes doit empêcher la population de verser dans ses mauvais penchants, et l’argent physique sera remplacé par la monnaie électronique. Graham Bricke a un plan pour dérober une des machines destinées à charger les cartes fiduciaires. Le problème, c’est que certains n’ont pas tenu leur langue et que d’autres ont bien l’intention de doubler l’ancien criminel. Pour couronner le tout, il se voit contraint de s’adjoindre de nouveaux coéquipiers – un tueur psychopathe et une hacker nymphomane – à la dernière minute, sans savoir s’ils sont réellement fiables.
Jungle a la bonne idée de ressortir sous forme d’intégrale cette mini-série de Rick Remender. Le scénariste bâtit un polar noir qui réunit tous les ingrédients du genre sans jamais tomber dans les stéréotypes. La mécanique bien huilée rappelle celle des films « Ocean xx », mais dans une ambiance bien plus proche de celle de Scalped. Le pays est au bord de la guerre civile et certains sont bien décidés à commettre un dernier méfait leur assurant un avenir doré. Avec en toile de fond le compte à rebours avant la mise en oeuvre du plan de paix américaine, l’auteur installe les acteurs et pose les bases de l’intrigue. Déchirée par de scènes violentes et un érotisme cru, la montée en charge est lente et bénéficie de dialogues percutants ainsi que de personnages troubles et fascinants. La gestion du rythme est exemplaire pour cette série s'abreuvant de tension, d’adrénaline, de fausses pistes et de dénonciation de l’état tout-sécuritaire.
La partie graphique de Greg Tocchini n’est pas en reste. Son style en couleurs directes peut s’avérer déroutant du fait d'une certaine imprécision des traits des protagonistes, ou encore des tonalités choisies. Par contre, il en ressort une épaisseur, une moiteur collant parfaitement au récit. En y associant une mise en scène audacieuse, tant dans ses angles de vue que dans sa capacité à faire ressentir les mouvements, le dessinateur livre là une prestation impressionnante.
Destinée à un public adulte, cette œuvre a tout du classique.
Avant que l’argent liquide ne disparaisse et que le gouvernement américain ne contrôle les pensées de ses citoyens, une bande de truands aussi violents que décadents monte un dernier casse scénarisé par Rick Remender et illustré par Greg Tocchini (The Last Days of American Crime 2009, #1-3).
Aujourd’hui omniprésent sur le marché du comics indépendant avec des titres tel que Black Science, Deadly Class, Low (de nouveau avec Tocchini), Tokyo Ghost ou plus récemment Seven to Eternity, Remender s’y trouve généralement bien meilleur que lorsqu’il scénarise ses comics de super-héros vite oubliés. Ici cependant, il ne s’appesantit malheureusement pas sur la bonne idée à l’origine de son intrigue, ni sur le chaos qui parait régner aux Etats-Unis et se contente de nous présenter les préparatifs très, voire trop, mouvementés du casse. Les relations entre les personnages sont intéressantes à suivre – quoiqu’un peu caricaturales (le mec ténébreux, la fille facile, le salaud) –, mais on perd parfois le fil de l’histoire à cause de ce trop-plein d’action et de violence gratuite.
Le dessin est Tocchini est très bon, brut, très dynamique, un peu surchargé par moments, mais étonnement coloré, chaleureux et sexy pour ce registre, le polar, qui est d’ordinaire sombre et froid.
Si j’ai relu cet album, c’est en apprenant par hasard son adaptation prochaine au cinéma, pour Netflix, par Olivier Megaton. J’ai relu l’édition de Jungle! qui, en plus de son prix excessif à l’époque, aurait mérité d’avoir pour couverture une des magnifiques illustrations d’Alex Maleev plutôt que celle – bien ratée – d’un illustre inconnu. Mais surtout je découvre à cette occasion qu’il existait une édition précédente par EP Editions. Comment cet ex-éditeur a-t-il pu avoir l’idée, d’une part, de publier à l’unité un floppy à peine plus épais que la normale et, d’autre part, de le vendre 15 € ? Un prix qui grimpe à 50 € accompagné d’un coffret en carton ! C’est vraiment prendre les lecteurs de comics pour des pigeons...
Un très bon album ou le dessin un peu "brouillon" colle parfaitement à la violence et à l’insécurité que celui-ci dégage.
Le déroulement de l'histoire est dans la veine de certains films américains. Un polar noir qui maîtrise bien tous les codes du genre sans jamais tomber dans la surenchère inutile.
En plus de l'intrigue principale autour du braquage, l'auteur nous présente directement ou indirectement la vie et le passé de chacun des 3 protagonistes.
Cela à pour effet de rendre l'ensemble plus profond et plus authentique.
Seul point négatif, la traduction des textes. Il y a plusieurs incohérences au niveau des phrases avec parfois des mots inversés, répétés ou même manquants.
C'est dommage pour un ouvrage d'une telle qualité.