A
près plus d'une demi-douzaine d'albums ayant Le Louvre comme source d'inspiration, c'est au tour du petit frère de celui-ci, Le Louvre-Lens, d'être mis en image et, surtout, en abyme. La visite rêvée que proposent Loo Hui Phang et Philippe Dupuy dans L'art du chevalement plonge le lecteur dans les méandres de l'Histoire, à l'époque où art et travail étaient synonymes...
Faisant suite à Une élection américaine et aux Enfants Pâles, cette troisième collaboration entre les deux auteurs allie habilement le passé de la région et des hommes avec la mémoire et la préservation des souvenirs. Avant le musée, il y avait des mines, avant les artistes, des artisans. Orféo mène Pigeon, une bête de somme dont la tâche était de tirer des chariots de charbon au fond du puits, chez un paysan pour y prendre une retraite bien méritée. Juste sortis de la fosse, le duo tombe sur un bâtiment fait de lumière à l'intérieur duquel sont exposés une multitude de sculptures et d'artefacts.
La rencontre entre le héros et les merveilles exposées dans les galeries est racontée d'une manière captivante. Plutôt que de s'affronter dans un choc sociologique, les deux mondes – l'ouvrier et l'artistique – entament un dialogue dans lequel chaque partie va apprendre à connaître l'autre et finir par constater qu'elles ont plus de points communs que de différences. Sans donner de leçon, la scénariste réussit, grâce à une très belle écriture, à faire partager son admiration pour ces univers souvent décrits comme antagonistes. Il est même dommage qu'elle ait arrêté ses observations, cahier des charges de la collection oblige, au seuil de ce nouveau Louvre. Élargis et généralisés à une plus vaste échelle, ses propos auraient été encore plus intéressants.
Aux pinceaux, Dupuy a choisi une approche aérée et lâchée. Comme pour un croquis pris sur le vif, le dessinateur ne conserve que l'essentiel, l'âme de ses modèles en quelque sorte. Certes, les chefs-d’œuvres qu'il montre pourraient être plus précis, certains détails se résument à une simple esquisse, mais ils demeurent néanmoins parfaitement identifiables au premier coup d’œil. Résultat, les planches sont d'une extrême lisibilité et d'une grande poésie. Au final, le « contrat » est plus que rempli, l'ouvrage est passionnant à lire et encourage vraiment à aller découvrir ce nouvel établissement !
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