Le voyage Extraordinaire 2. Tome 2 - Le Trophée Jules Verne 2/3

G rande Bretagne, 1927. Noémie et son cousin Émilien Clausborough, petits génies de la mécanique issus de la gentry aussi fortunée qu'excentrique, ont décidé de participer au concours Jules Verne afin de débusquer le mystérieux commanditaire à l'origine de l'enlèvement du père d’Émilien. Accompagnés de Térence et Amélia, les assistants du professeur Clausborough ainsi que de Winfrey le garde du corps-homme à tout faire, ils s'enfuient du domaine familial pour prendre la route particulièrement mouvementée de Paris. En effet, en pleine guerre mondiale, ni Londres, ni la Manche ne sont des zones sûres, d'autant plus qu'une troisième force s'est récemment ingérée dans le conflit et attaque aléatoirement les deux camps. Pris au milieu des belligérants, les héros s'esquivent de justesse grâce à leur prototype sous-marin.

Loin de donner une réponse aux interrogations posées dans le premier volume - le lecteur n'apprendra rien de plus sur la Troisième force, ni sur la véritable raison du retour des parents vagabonds de Noémie - cet opus amène d'autres questionnements et de nouvelles inquiétudes : Qu'est devenue la mère d’Émilien, cette femme dont personne ne parle et qui n’apparaît sur aucune photo ? La confiance des enfants envers leurs compagnons adultes n'est-elle pas précipitée ? L'intrigue bascule à l'arrivée dans la Ville Lumière dans le danger de l'espionnage et des convoitises autour des secrets technologiques détenus par M. Clausborough.

Le steampunk est une réalité alternative qui couvre généralement les années 1870 à 1910, plus rarement, il s'égare sur les années 20 et 30 qui sont le domaine du Pulp. C'est une Belle Époque fantaisiste qui se prolonge avec pour principe que toutes les inventions imaginées par Jules Verne et H. G. Wells sont devenues réelles. Le voyage extraordinaire en respecte tous les codes, à commencer par son édition spécialement soignée qui reprend le cartonnage Hetzel et donne le ton avant même d'ouvrir le livre. La mise en scène d'un monde perdu est magnifiquement rendu par le trait de Camboni : architecture délirante de verre et d'acier, serres tropicales, machines rétro bronze et bois... Le tout magnifié par une colorisation d'une rare beauté, illuminant les planches d'une lumière chatoyante comme jaillie à travers des vitraux à la Mucha. C'est une immersion totale dans une ambiance nostalgique qui rappelle les émotions des classiques steampunk du cinéma comme les Désastreuses Aventures des orphelins Baudelaire, du Château Ambulant et À la croisée des Mondes et les sensations des jeux vidéos Myst, Zork Nemesis voire le prochain Bioshock. Cet ouvrage est d'autant plus plaisant qu'il met en valeur des personnages totalement verniens, scientifiques de haute volée ayant le goût du savoir et de la curiosité, à cent mille lieues des héros actuels de notre médiocratie.

Un graphisme sublime, un univers intrigant et maîtrisé et des protagonistes attachants, ce tome deux apporte la confirmation d'une grande saga fantastique qui ravira un public familial comme celui, plus pointu, des amateurs du genre.