1941, le pacte germano-soviétique tient bon. L’Espagne a signé un armistice avec la France. Du côté des Alliés, l’entente n’est pas vraiment cordiale : les Anglais sont soupçonnés de vouloir se retirer de l’Hexagone et de chercher à agrandir leur empire colonial, l’expansionnisme du Japon – en lutte avec l’Union Soviétique et la Chine – gêne les Américains qui ne sont pas encore entrés en guerre. En Allemagne, un putsch renverse Goebbels au profit d’Himmler. Sur les différents théâtres des opérations, les positions sont stables, mais Churchill craint de ne plus pouvoir tenir longtemps. La solution : les États-Unis doivent participer au conflit. Le moyen : que Roosevelt soit assassiné par les Russes !
Pour ce troisième opus de la série, Mathieu Gabella a concocté un récit d’espionnage millimétré. Henry, sommité des services secrets, vient de perdre sa fille, victime du bombardement de Coventry. Le choc est d’autant plus rude que les Britanniques sont capables de décoder les conversations des forces ennemies et ont pu, jusqu’à présent, intercepter la majeure partie des raids aériens. Le mystérieux espion est contacté par Churchill et se dit capable de réaliser le plan du premier ministre en allant chez les communistes pour y extraire un agent qui se chargera de l’exécution du président américain. Pour cela, il lui faut la fameuse machine de décryptage, Enigma, ce que Churchill refuse. Les deux hommes se brouillent et quelques jours plus tard, Henry s’enfuit vers Moscou.
Le but de la narration va alors être de promener le lecteur tel une boule de flipper, l’envoyant rebondir sur les vrais et faux mensonges, les chausses trappes et autres faux-semblants. Henry - qui soupçonne les autorités d’avoir laissé l’attaque aérienne sur Coventry se dérouler pour ne pas risquer de révéler leur capacité à décoder les transmissions - est-il en train de livrer ce qui constitue le seul avantage de l’Angleterre ou cherche-t-il à mystifier l’adversaire ? Les Anglais sont paniqués, les Soviétiques sceptiques d’autant plus qu’il règne, chez eux, un climat de paranoïa et qu’une erreur peut très vite conduire au goulag. Jusqu’à bout, le scénariste maintient le suspense et l’intérêt, laissant toutes les hypothèses possibles jusqu’au dénouement.
L’histoire reste toujours fluide, bien aidée par le graphisme réaliste de Vincent Cara. Ses personnages bien représentés et mis en scène à travers un cadrage nerveux et dynamique confèrent du caractère à l’aventure.
Au final, un scénario retors qui exploite intelligemment un contexte géopolitique original.
Retrouvez la chronique tome deux.
Bon album, au scénario effectivement en béton armé, totalement dans le genre de l'espionnage pur et dur, le tout en temps de guerre.
Le dessin est superbe au début, mais le dessinateur (qui m'a donné envie de lire "reign", juste pour voir) ne tient pas la cadence sur 60 pages.
Reste l'éternel problème des histoires sur 60 pages ; pas assez de pages pour développer les personnages, qui sont un peu froids et sans âme (à part Mister X, mais enfin même lui...).
En tout cas, une série anthologie décidément bien née.
Autant les 2 1ers tomes de cette série ne m'ont pas enthousiasmé autant ce opus est excellent...C'est une histoire d'espionnage pur jus comme seuls le rosbifs (pardon, les anglais) savaient à l'époque se montrer dignes...On se croirait dans un roman de l'excellentissime et redoutable John Le Carré...Le scénario est cohérent, structuré, adossé à un superbe dessin aux couleurs de circonstance...Très belle couverture également...Anna, Henry, Iemelian nous tiennent en haleine, aux cotés de Churchill, Philby (célèbre taupe russophile) et en fin d'album de Lawrence (d'Arabie, bien sur)...Belle réussite, vraiment...