A
près la tempête, il est toujours intéressant d'aller fouiner sur la plage, des fois que des objets de valeurs s'y soient échoués. Grosse surprise cette fois-ci ! En plus des restes d'un navire français (hahaha, bien fait), les bonnes gens d'Hartlepool ont découvert un survivant ! Un marin ? Un espion ? Pire que ça, un envahisseur a posé ses pieds velus sur la terre anglaise ! Pour l'honneur de la Couronne, il est temps d'agir !
C'est au détour d'une discussion passablement arrosée dans un pub de Manchester que Wilfrid Lupano (L'homme qui n'aimait pas les armes à feu, Azimut) a entendu parler pour la première fois de la légende du singe d'Hartlepool et de la réputation que ce supposé épisode "historique" a donné aux habitants de cette ville. Après quelques recherches, cette anecdote, peu glorieuse et largement passée sous silence de ce côté de la Manche, s'est transformée en un des plus décapants albums de l'année. Mais ce serait mal connaître le créateur d'Alim le tanneur que de voir dans cet opus une simple farce se jouant de la rivalité franco-anglaise. En effet, ce dernier a tourné son histoire pour en faire un conte universel dénonçant la petitesse d'esprit et la bêtise revendiquées des ignorants de tous bords.
Oui, c'est hilarant, oui les dialogues sont cinglants et oui, les personnages sont truculents. Méfiez-vous néanmoins. Sous ces airs de pantalonnade, le ton est, en fait, sombre, glacial. Entraîné par quelques voix soi-disant informées (le génial ancien combattant de la bataille de Québec) ou l'ambition de certains (le maire qui rêve de mettre sa ville sur la carte), la foule se transforme en juge et parti prêt à tous les extrêmes pour que « justice » soit rendue. Les propos du scénariste font mouche à chaque page. De plus, il a très bien su emballer son récit de petits détails (les enfants qui s'amusent à la guerre, le médecin de passage, le matelot bilingue, etc.) semant ainsi d'autres niveaux de lecture à découvrir ultérieurement.
Pour un premier ouvrage, Jérémie Moreau entre par la grande porte dans le monde de la BD. Ce dessinateur venant du monde de l'animation illustre cette fable dans un style des plus convaincants. Citant des artistes anglais classiques (Quentin Blake, Ralph Steadman ou Ronald Searle) comme inspiration principale, l'influence du grand Fred se fait aussi sentir dans ses planches. Le trait est fougueux, flirtant même avec le baroque par moments. Les couleurs, également des plus réussies, renforcent l'atmosphère à la Dickens de ces pages. Moreau capte parfaitement l'essence du scénario, un savant mélange de farce et de drame dans lequel la franche rigolade se transforme en ricanement amer d'une case à l'autre.
Franche réussite, Le singe de Hartlepool est à découvrir dans les plus brefs délais.
Il s'agit d'une belle bd se basant sur un fait divers survenu durant les guerres napoléoniennes et qui souligne l'absurdité et la bêtise humaine. Visiblement, aucun des deux camps qui s'opposent ne sera épargné par cette folie aveuglante.
Nous avons un capitaine de navire français qui fut autrefois un négrier et qui n'hésite pas à sacrifier un jeune moussaillon au seul tort qu'il a eu une nourrice anglaise lui apprenant des chansonnettes de la perfide Albion. de l'autre côté, nous avons une population tellement emplie de haine qu'elle ne sait pas faire la différence entre un français et un singe.
J'ai bien aimé la démonstration faite par les auteurs car au-delà d'un conte aux allures naïves, il y a une réelle critique du racisme pouvant conduire à l'absence de discernement. C'est dans les situations de guerre ou de crise que la population cherche un bouc émissaire et déverse sa haine sans essayer de comprendre. Notre pauvre petit singe en a fait les frais. Mais demain, à qui le tour ? Aux étrangers ou assimilées comme tels ? Aux fainéants qui sont au chômage ?
Bref, c'est une bd dont les réflexions non dites sont à méditer.
En 1814, au large des côtes anglaises de Hartlepool, un navire napoléonien chavire. Les anglais capturent la mascotte du bateau, un singe, qu'ils prennent pour un espion français ! Inspirée d'un légende anglaise, l'intrigue de Wilfrid Lupano est édifiante. Les dessins de Jérémie Moreau sont moins convaincants.
Une édition spéciale enrichie d'un cahier historique de 22 pages est également disponible. Format compact de l'excellente collection "Mirages" de Delcourt (celle de des albums de Cruchaudet, Un océan d'amour et Endurance par exemple). La couverture (qui ne reflète pas vraiment l'album mais participe à l'implication du lecteur pour ce pauvre singe) est très belle et inspirée.
En 1814 alors que la haine réciproque entre français et anglais est plus forte que jamais, un navire de l'Empire fait naufrage sur les côtes de la perfide Albion. En réchappent un jeune mousse élevé par une nourrice anglaise et un singe. Cela va déclencher dans ce petit village de pécheurs bouseux une réaction de haine absurde contre ce "français"... de singe!
Attention, chez Lupano s'il y a toujours de l'humour, il peut être féroce, voir très noir. C'est le cas avec cette fable issue d'une légende anglaise (expliquée par une post-face de l'auteur) qui illustre le mécanisme de haine collective qui peut se déclencher lorsque le nationalisme exacerbé tombe sur des enclaves isolées. Les affreux sont des anglais, ils auraient pu être français ou malgaches... Car le propos est le même que dans toute fable, dans tous récit absurde (genre souvent exploité chez Lupano comme récemment avec son Cheval de bois, cheval de vent): explorer les mécanismes collectifs qui dépassant la raison et dévoilent les noires pulsions humaines et leur ridicule.
La mise en scène est très proche du théâtre, avec une presque unité d'action et un singe qui aurait pu être totalement absent (cela aurait pu renforcer le côté absurde). Mais les auteurs tentent par moment de nous présenter ce regard incrédule du Chimpanzé pour toucher notre humanité justement. Pourtant le propos n'est pas le tragique de sa situation (puisqu'on fréquente peu le singe) mais le côté ubuesque de cette population désirant utiliser cette présence "française" pour dépasser l'insignifiance de ce village trou du cul de l'Angleterre. Ainsi, si l'identité du français ne pose de problème à personne, tout l'enjeu des villageois, à travers un procès fidèle aux valeurs démocratiques de la grande Nation et des glorieux sujets de sa majesté est de prouver que l'espion attrapé préparait une invasion du Royaume par les troupes napoléoniennes... Le scénariste a tout bon lorsqu'il s'abstient, même avec le personnage témoin du médecin, de comparer les bons personnages des mauvais et de toute mièvrerie. La scène ne mérite pas de commentaire et Lupano laisse le lecteur-spectateur seul face à sa sidération. Tout est compris, il n'y a plus rien à dire.
Graphiquement Moreau croque ses pécheurs de façon atroce, comme ce vieux vétéran des guerres américaines, sorte de morceau de barbaque sur un charriot (il a perdu ses jambes) ou le maire, plus simiesque que le singe. Les couleurs sont très jolies et participent à l'ambiance très théâtrale de la BD (le rouge sanglant du ciel lors du procès). Mais soyons clair: dans cette comédie humaine le dessinateur nous croque une farce, sorte de florilège de toutes les pires expressions et visages de l'humanité haineuse. On retrouve par moment l'esprit de Masbou sur De capes et de crocs lorsqu'il dessine des scènes de panique générale avec forces caricatures.
Le Singe de Hartlepoole est une BD cruelle. Lupano laisse peu de place à la compréhension dans la connerie humaine qui concerne à peu près tout le monde (sa série des Vieux Fourneaux est bien plus optimiste si l'on peut dire) et fait feu de tout bois, avec intelligence, subtilité, radicalité. Un grand scénariste.
Lire sur le blog:
https://etagereimaginaire.wordpress.com/2018/02/28/le-singe-de-hartlepool
Cette légende méconnue du folklore anglais est magnifiquement relatée et mise en image par Lupano et Moreau.
C'est féroce, ça sonne juste et le dessin de Moreau porte bien le scénario de Lupano. Les personnages apparaissent dans tout leur laideur, mais ont aussi leurs côtés bienveillant pour les membres du groupe. C'est caustique tant pour les anglais que les français, chacun à sa caricature et finalement, les plus "humain" apparaissent finalement comme ceux qui sont extérieurs à la ville. Cette parabole, qui semble avoir une base historique, rappel combien l'individu peut se transformer quand il porté par la ... meute. Utile à faire lire au (pas trop) jeune public.
Le singe de Hartlepool est tiré d'une légende. L'histoire se déroule à l'époque napoléonienne et raconte le naufrage d'un navire sur les côtes de l'Angleterre où seul un singe sera rescapé. Malheureusement pour lui, la population locale le prend pour un français. Normal, à cette époque qui a déjà vu un Français ! Alors celui-ci sera jugé et pendu par une population totalement inculte persuadée qu’il s’agit d’un espion. Seul un médecin de passage, plus savant donc plus sachant que les autres, sera horrifié de la méchanceté et de la bêtise des gens du village d’Hartlepool.
Beau livre contre l’intolérance, l’inculture et l’incurie de ceux qui condamnent à la va-vite.
Belle adaptation d'une curieuse légende Anglaise, en espérant qu'elle n'ai jamais existé. Un bon scénario écrit avec humour pour une histoire qui ne devrait pourtant faire rire personne. Les dessins sont adaptés au ton décalé de l'album.
Un hymne à la bêtise et l'ignorance... à découvrir
Le dossier en fin d'album ne m'a par contre que très peu intéressé, j'aurais préféré en savoir plus sur cette légende et de ce qu'il en reste aujourd'hui.
L'ensemble est plutôt drôle avec un dessin particulier et une jolie colo façon aquarelle. Sous couvert de l'humour, lupano met en évidence la bêtise humaine et la peur de l'autre (sur le fond historique de la haine Franco-Anglaise sous le premier Empire) en se basant sur une légende anglaise que je ne connaissais pas. A lire...
Pour moi, tout le meilleur de Lupano est là : drôle et à la fois grave, simple et à la fois subtile, imaginaire et à la fois réaliste et historique.
C'est pour moi un vrai chef d'œuvre, qui devrait devenir un classique.
Ici vous entrez dans le grandiose : la bêtise humaine confrontée à son ignorance, sur fond d'histoire. Le mélange est aussi prenant que poignant.
Merci aux auteurs pour cette expérience littéraire.
INCROYABLE. Ce one shot est époustouflant. Scénario extraordinaire autour de la bêtise humaine et de ses conséquences et dessin nerveux, parfaitement adapté à cette triste et parfois grotesque histoire franco-anglo-animalière. Une merveille.
Très bon one shot qui interpelle, fait réfléchir et se délecte sans répit.
Une vraie ambiance se dégage dès les premières planches grâce notamment à une mise en scène dynamique et un dessin personnel et énergique. Les trognes des personnages anglais sont vraiment typiques, réussies, à la limite de la caricature (l’aubergiste,..).
Le destin de ce singe de Hartlepool (issue d’une vraie légende anglaise) ne laisse pas indifférent et la façon dont Lupano arrive à nous conter cette histoire ô combien cruelle avec des pointes d’humour bien placées, est remarquable. Il y a une vraie réflexion sur le racisme et j’ai parfois été secoué devant tant de cruautés, bêtises et ignorances humaines.
Un bien bel album que je recommande chaudement.
Les auteurs nous plongent, avec brio, au cœur de la folie des Hommes, aveuglés par une haine guerrière et un racisme ignorant.
Le dessin de Jérémie Moreau est tout simplement sublime, très personnel, avec des couleurs qui mettent en valeur les différentes ambiances (notamment un super ciel rouge sang lors de la scène du « jugement » sur la plage). Les personnages (détestables ou attachants) ont vraiment du caractère grâce à ce trait énergique et mordant. Belle carrière en perspective…
Une fois de plus, le scénario (très bien mené) et les dialogues de Lupano sont excellents ! Le caractère arrondi des cases rend la lecture dynamique, et le petit format est très agréable à lire : on dévore ce one shot qui mérite amplement les différents prix reçus !!
Bravo aux auteurs !!!
Tous les ingrédients sont réunis pour le plus grand bonheur du lecteur.
- un scénariste qui a sû s’inspirer d’une histoire vraie pour proposer un récit tragi-comique très bien ficelé et des dialogues parfaitement adaptés à la situation
- un dessinateur qui, pour une première BD, a très bien maîtrisé la couleur et les cadrages et surtout, qui a admirablement mis en scène des personnages grotesques et dégénérés avec un style graphique frais, expressif et nerveux.
Au bout du compte, une histoire réussie, un clin d’œil final très bien amené, et une morale.
Quand la peur de l’étranger domine et que la bêtise n’a pas de frontière, l’animal sauvage n’est pas forcément celui que l’on croit...
Voilà une BD qui fait du bien...
Franchement, un grand bravo aux deux auteurs...Le scénario est limpide et le dessin illustre magnifiquement le récit. Ce fut une lecture super agréable.
Un prix pour cet album me semble indispensable...
Une collaboration à refaire sans hésitation et découverte d'un jeune dessinateur qui semble être promis à un bel avenir dans la BD.
SI VOUS VOULEZ PASSER UN BON MOMENT : LISEZ CETTE BD.
Le dessin est vif et juste et les dialogues sont savoureux...
Ca se voit que j'ai adoré cet album? ;)
Une comédie grinçante autour de la bêtise humaine
Mais comment ces idiots de villageois ont-ils bien pu se tromper? C’est pourtant une histoire vraie qui colle encore à la peau de Hartlepool et de ses habitants. Le scénariste Wilfried Lupano (père de l’excellent Azimut) a fait de cette légende une comédie humaine caustique conjuguant bêtise humaine, nationalisme exacerbé et peur de l’étranger. Les situations absurdes sont aussi comiques qu’affligeantes.
Le dessin du jeune dessinateur Jérémie Moreau participe largement à ce ton tragicomique. Les personnages ont une « gueule ». Un trait légèrement caricatural, mais qui fait preuve de beaucoup de finesse.
Bref, on sourit et on grince des dents.
http://bdsulli.wordpress.com/
Ce one shot est tout simplement extraordinaire....Que les sujets de la perfide Albion aient pu, dans leur légendaire haine du "frenchie" confondre un marin de la marine impériale française avec un singe, peut sembler grotesque, mais la mise en scène est admirablement bien présentée, avec à l'appui un dessin peut être particulier, mais extrêmement vif et puissant....A lire absolument et à conserver...
Très bonne surprise que cette légende du singe pendu comme espion français dans un petit village anglais, histoire caustique tragi-comique qui en dit beaucoup sur la bêtise humaine, même si c'est raconté avec beaucoup d'humour.
Les dessins sont raccords avec le fonds avec des trognes très expressives et des paysages qui reflètent bien l'ambiance.
Lupano est décidément un auteur à suivre et Jérémie Moreau une bonne découverte.
Excellent one-shot, découvert après avoir lu l'interview de Lupano dans mon quotidien. J'ai simplement adoré cette bd, admirablement dessinée et abordant la bêtise humaine sous forme originale. Inspirée d'une histoire vraie, on appelle d'ailleurs toujours les habitants de Harlepool les pendeurs de singe, la bd se pose comme une espèce de fable sur l'ignorance, les nationalismes, la peur de l'autre qui font que l'homme peut se rendre coupable des pires atrocités en toute bonne foi. Ce qui est très fort dans cet album, c'est l'alternance entre les passages vraiment drôles et les plus dramatiques. Bravo aux dessins de Jérémie Moreau qui servent admirablement le texte, le trait est souple et vivant. A découvrir sans tarder, je rejoins les chroniqueurs pour parler de réel coup de coeur 2012.