C
osmos, c’est papa ? Cette interrogation taraude les enfants de Nathan, un discret chauffeur de bus, qui découvrent le super héros de la ville inanimé dans leur cuisine… Depuis bientôt trois ans, un phénomène étrange se produit régulièrement : les émergences, qui voient des individus ordinaires se transformer soudainement en monstres incontrôlables et ravageurs. Invulnérables ? Non, car Cosmos, protecteur masqué, intervient à chaque métamorphose pour maitriser les créatures en furie, jusqu’à ce qu’elles retrouvent leur forme humaine. Ces manifestations sont devenues si courantes et leur résolution si simple, que les autorités n’ont pas pris la moindre mesure pour comprendre et endiguer ces apparitions. Et pourtant, que se passerait-il si Cosmos venait à disparaitre ?
Ce premier tome - d’une série de six - explore cette question sous le double point de vue d’un journaliste contestant l’inaction gouvernementale et, surtout, d’un quatuor de jeunes gens qui vont endosser le costume du super héros. Il y a là les trois fils de Nathan/Cosmos : Virgile, l’ainé, lycéen brillant et réservé, Oscar, son cadet, play-boy débonnaire à l’humour ravageur et, enfin, Elias, le benjamin, encore un gosse. Bria, une amie de Virgile, complète cette sympathique petite bande, dont chacun des caractères est soigneusement développé par l’auteur avec justesse et ironie. Par-delà une intrigue rythmée en diable qui sait entretenir un suspense croissant tout au long de ces quelques deux-cents pages, la réussite majeure de cet album réside dans sa capacité à imposer une affection immédiate envers ses personnages.
Empruntant le format et le tempo feuilletonnant des comics, adaptant les tramages de gris typiques des mangas, mais développant un univers original d’un trait tout personnel, l’auteur marche ainsi sur les traces d’un Florent Maudoux (Freaks' Squeele - Ankama), contribuant aussi à l’émergence d’une BD contemporaine bousculant les habitudes avec allégresse. L’alliage d’une composition classique et de cadrages dynamiques (gros plan, plongée, contre-plongée…) sert l’histoire efficacement mais sans afféterie. L’encrage relativement contrasté et appuyé donne au graphisme une tonalité plutôt sombre qui tranche avec l’atmosphère plaisante et jubilatoire du récit, comme pour instiller une dose supplémentaire de fébrile curiosité.
Venu de la blogosphère - où il officie sous le pseudonyme de "l’esbroufe" -, Rémi Gourrierec frappe donc juste et fort avec cette série prometteuse, ses héros attachants et son scénario haletant, laissant le lecteur avec un sentiment de frustration intense tant la suite se fait désirer sitôt la dernière page tournée.
Prix spécial du jury du festival Utopiales Nantes 2012 :
C'est pour cela que j'ai entrepris de le lire, malgré le peu d'attrait à priori pour les dessins et le format style manga. D'autant que les têtes des personnages sont un peu bizarres avec leurs grands yeux qui mangent tout. Mais à la lecture, c'est très dynamique et expressif, avec une mise en scène bien maîtrisée. Quant au scénario, cela démarre doucement avant que l'on comprenne qui est qui, mais cela devient carrément addictif au fur et à mesure, avec des personnages attachants qui ont de la personnalité, en nous laissant à la fin avec une furieuse envie de connaître la suite !
Bref une réussite à découvrir, incontournable pour les amateurs de SF.