L
éonid Miller est un informaticien pour qui la virtualité tient lieu de réalité. Entretenant avec ses contemporains des relations limitées au strict nécessaire, il se réfugie dans un monde peuplé d’algorithmes et de films en VO. Un soir, à la sortie du Kinorama, il constate qu’il a perdu toute matérialité ! Dès lors, il déambule sans but à travers une ville qui ne se souvient déjà plus de lui… Mais un jour, il croise Françoise Angelli, la star montante du cinéma français qui, curieusement, semble souffrir du même mal que lui !
L’homme qui n’existait pas est le nouvel album, très personnel, de Cyril Bonin qui, une fois encore, cumule les rôles de dessinateur, scénariste et coloriste. Graphiquement, ce one shot reste dans la lignée de Chambre obscure ou de La Belle Image : les silhouettes féminines possèdent toujours cette même élégance longiligne et la mise en couleur s’appuie encore sur une palette chromatique qui, si elle sied bien aux histoires du début du XXème siècle, apparaît anachronique dans une histoire contemporaine. Ceci n’altère cependant en rien la qualité de la construction scénaristique qui se joue intelligemment des transparences en fonction de la réalité des choses, mais qui manque singulièrement de rythme. En effet, du moins dans sa première partie, l’histoire semble devoir se perdre en privilégiant une approche introspective et très existentielle. Heureusement que dans les dernières planches, les dialogues prennent définitivement le pas sur le narratif, donnent au récit une tout autre dimension et finissent par sortir le scénario de la relative monotonie dans lequel il s’installait.
Après La Belle Image qui conte le changement du visage d'un homme qui remet toute sa vie en question, l'auteur Cyril Bonin poursuit sur ce thème avec l'homme qui n'existait pas. En effet, en l'espèce, l'homme devient invisible aux yeux du monde. Pour l'originalité de l'oeuvre, il faudra repasser. Néanmoins, j'ai beaucoup apprécié ce nouvel opus qui plonge également dans les vieux films de cinéma comme pour donner une nouvelle dimension.
L'homme est informaticien. Il ne réagit pas avec les sentiments mais avec les faits. Il est seul et travaille constamment avec la machine. C'est lui qui va disparaître comme pour nous faire comprendre de la vacuité de l'existence. A force de s'isoler pour se protéger des autres, il finit par disparaître. Il est condamné à hanter les lieux. Or, il va faire une rencontre qui va tout changer et mettre un peu de piment à sa vie. En réalité, c'est sa passion pour le cinéma qui va lui ouvrir certaines portes.
J'ai aimé cette fable sur l'identité humaine. Elle est très subtile d'autant que sa conclusion laisse place à l'espoir. Encore une fois, l'auteur arrive à nous subjuguer grâce à une incroyable lisibilité de son récit malgré une approche très intimiste et le peu de dialogue.