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ozumi a fini ses études universitaires, mais il n'a pas trouvé de vrai emploi à la fin de son cursus, ou plutôt il n'a pas cherché. Il vit grâce à un petit job d'employé dans un convini (une sorte d'épicerie, en plus généraliste), un emploi sans avenir. Uozumi ne sait pas très bien où il en est par rapport à la société japonaise où l'on existe surtout par rapport à son métier. Pour couronner le tout, deux jeunes filles vont venir bouleverser son illusion d'équilibre: Haru, qui se promène toujours avec son corbeau apprivoisé, et son amie et amour secret d'université, Shinako, de retour à Tokyo après 6 mois d'absence...
La rentrée d'Akata est décidément riche en bonnes surprises: après l'intrigant "Ki-Itchi" et avant "Ayako" du maître Tezuka, l'éditeur nous propose cette douce romance en trois tomes, sur un triangle amoureux. Banal? oh que non! Sing "Yesterday" for me, sous des dehors sobres, se révèle être un des ouvrages les plus aboutis de cette prolifique période de rentrée.
Kei Toume nous offre un ensemble très homogène et cohérent: son dessin parait volontairement crayonné, ce qui donne une impression de spontanéité et de simplicité au manga, ça va directement à l'essentiel. Ses héros sont comme ses dessins, ils se cherchent souvent, ils recèlent en eux une part d'instabilité, ce qui les rend humains et crédibles. La narration est incroyablement fluide, servie par un découpage simple, sans effets spectaculaires. Il y a une volonté de faire "couler" le récit, de le brusquer le moins possible, dans le but d'amener une ambiance mélancolique, mais pas déprimante.
Le premier tome de Sing "Yesterday" for me nous entraîne dans la vie de Uozumi, une vie loin d'être trépidante, plutôt fade et triste. Il n'est pas satisfait de sa condition mais ne fait rien pour en changer, parce qu'il a peur, parce qu'il est désorienté, perdu dans une société dont il ne se sent pas proche, et il ne voit pas d'un très bon oeil l'intrusion de Haru dans sa vie. Shinoka, pour sa part, a un emploi stable et rémunéré correctement (elle est professeur), et semble être l'antithèse d'Uozumi: réfléchie, intégrée dans la société japonaise... Pourtant, si sa fragilité est enfouie, elle n'en est pas moins présente, palpable. Shinoka cache derrière son emploi et son image respectable de gros problemes relationnels...
C'est Haru qui va amener à Uozumi un peu d'ordre, de stabilité dans sa vie, elle qui a quitté le lycée pour devenir hôtesse dans un bar de nuit, elle qui a apprivoisé un corbeau éclopé... Haru parait être celle qui a le plus de raisons d'être perdue, mais elle survole malicieusement Uozumi et Shinako, atterrissant parfois pour aider l'un ou l'autre, élément insaisissable mais stable, solide, sur qui on peut compter. Inconsciemment, elle amène Uozumi et Shinoka à réfléchir sur leur vie. Elle est le personnage clé du récit, celui qui attire l'oeil graphiquement et celui dont les paroles restent quand on a fermé le livre.
Lire Sing "Yesterday" for me, c'est comme être assis sur la rive d'un fleuve, sous un ciel gris-blanc: on se sent apaisé, calme, on suit le courant des yeux, tandis que la mélancolie nous gagne doucement, une "mélancolie positive", propice à la rêverie... un endroit où le temps est une notion floue, où tombe doucement un petit crachin agréable...
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