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uébec, tournant du XXe siècle. Nid de Roche est une petite localité isolée vivotant en quasi-autarcie. Au plus profond de l’hiver, plusieurs incidents tragiques viennent bouleverser le village. D’abord, Pricille, une prostituée, est assassinée. Ensuite, c’est au tour de Clovis – un témoin trop curieux - de passer à trépas d’une façon suspecte. Finalement, l’étrange suicide de Richer, le maire et potentat local, finit de mettre en émoi les habitants. L’enquête qu’entame Emile, le shérif, va mettre à jour une multitude de fourberies. La vie à Nid de Roche ne sera plus jamais la même.
Avec pas moins de vingt-six titres au cours de ces dix dernières années, Jean-Blaise Djian ( Les Quatre de Baker Street, Mise en bouche) s’est forgé une bibliographie impressionnante et très variée. Tard dans la nuit, originellement publié en trois volumes entre 2004 et 2006, est un récit psychologique des plus tendus. Le scénariste met en scène toute une galerie de personnages au vécu très fouillé. Tous les protagonistes – du premier au dernier rôle – sont montrés avec minutie. Au fil de l’intrigue, ils se développent et se révèlent être tour à tour conquérants, déçus ou même traîtres, mais toujours d’une manière très logique par rapport à leurs caractères respectifs.
Sous l’impulsion de son dessinateur, le québécois Voro ( Eté 63), le scénariste a enraciné son récit en Nouvelle France. L’idée est des plus judicieuses, la difficile situation économique qu’endurait la région à cette époque étant en parfaite concordance avec cette histoire. Malheureusement, là où le duo Loisel et Tripp, dans Magasin Général, ont si bien réussi à retranscrire l’âme québécoise, Djian peine à utiliser les particularités locales pour nourrir son scénario. Que ce soit au niveau des dialogues et de nombreuses situations, jamais le lecteur ne retrouve vraiment l’atmosphère unique de la Belle Province.
Graphiquement, Voro, dont Tard dans la nuit est la première BD majeure, semble plus surnager que vraiment maîtriser ses pinceaux. Sans être complètement rébarbatif, son trait est très inégal d’une page sur l’autre. Décors très détaillés puis à peine ébauchés se succèdent avec bien peu de grâce. Les personnages souffrent également d’un manque de rigueur. Les poses sont souvent très figées, sans vie. Heureusement, la mise en page, très variée aux angles de vues originaux et acrobatiques, permet de dynamiser un rendu général quelque peu brouillon.
Tard dans la nuit, malgré ses nombreuses qualités, peine un peu à convaincre sur la longueur.
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