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ils d'un oligarque russe victime d'une cabale ourdie par l'homme qui tient les rênes du pays, Micha Khodorlovski est aujourd'hui un fugitif après avoir dû s'expatrier. Fini le cocon protecteur du lycée suisse pour gosses riches dans lequel il coulait des jours paisibles tandis que son père restait enfermé sans espoir qu'un procès se déroule un jour. Protégé par l'imposant Igor, il doit désormais échapper aux hommes de mains du tyrannique Paline (!). Avant d'aller plus loin et lui rendre la monnaie de sa pièce ?
Si Milan K. peut surprendre c'est avant tout parce que cette série se trouve au catalogue des Humanoïdes associés qui ne nous avaient guère habitués à ce type d'histoire. Pour son premier scénario, Sam Timel, pseudo retenu pour des premiers pas dans la BD européenne, livre une copie (sans jeu de mot aucun) qui aurait tout à fait sa place au milieu des titres de la Troisième vague du Lombard, avec quelques effets pyrotechniques et de tôle froissée style Casseurs en plus. Une toile de fond située dans le monde des affaires, des méthodes musclées où gorilles et tueurs pointent pour le compte des puissants qui ignorent les lois, quelques jeunes femmes qui ont de l'allure et l'on ne se trouve pas si loin non plus d'un des terrains de jeux arpentés avec le succès que l'on sait par Jean Van Hamme. D'ailleurs, outre les racines russes des protagonistes, guère besoin d'être une fine mouche pour trouver une similitude entre une Lady S. et un Milan K. dès la découverte du titre … Pas de quoi gémir pour autant, parce que le script de ce premier volet fait preuve d'un savoir-faire indiscutable qui permet à l'efficacité qu'il affiche de compenser un certain manque d'originalité. Le prix de la survie ne s'embarrasse pas d'hésitations ou de zones d'ombre inutiles, il va droit au but tout en se ménageant quelques pistes d'évolution qu'il affiche sans complexe comme quelques séries TV outre-Atlantique savent en ménager (Qui, réellement, tire les ficelles ? Combien d'énigmes laissées par son père le jeune Micha devra-t-il résoudre ?). Il suffit d'être un minimum client du genre pour s'offrir un quart d'heure plaisant.
Il faut cela pour ne pas trop tiquer sur le graphisme du débutant Corentin (coloriste de Shimon de Samarie chez le même éditeur). Sans chercher à charger la barque, son trait réaliste pêche dans la réalisation de décors plus pauvrets que réellement dépouillés tandis que la position des personnages dans les scènes d'action laisse penser à des insertions maladroites et que les explosions manquent d'impact à cause d'une définition incertaine et d'une mise en couleur générale peu convaincante. Insuffisant pour réellement gâcher le plaisir d'ensemble mais indiscutablement perfectible.
Compte tenu du succès rencontré par les Largo W., Larry B., en allant pourquoi pas jusqu'à Niklos K., il doit bien y avoir une petite place pour le petit dernier, Milan K. Si le scénario garde le cap en faisant preuve de caractère, si la mise en image s'affirme en gommant ses défauts de jeunesse, il devrait pouvoir se faire une place dans les bibliothèques de quelques insatiables.
A l'occasion du 40ème anniversaire des Humanoïdes Associés, il a été proposé une intégrale de cette série regroupant les trois premiers volumes constituant la première saison. Depuis, on attend la seconde saison qui ne vient pas.
Cette série s'inspire de la Russie du Président dictateur Poutine qui n'a pas hésité à tuer ses adversaires politiques de manière assez sordide pour que cela passe bien dans l'opinion publique et surtout pour conserver le pouvoir à tout prix. Le président Vladimir Paline ressemble trait pour trait à Poutine. Il n'y a pas de doute là-dessus.
Il est question également de la destitution d'un oligarque russe qui s'est rapidement enrichi grâce au pétrole au point de devenir la première fortune du pays et de faire de l'ombre au pouvoir en place. Il est vrai que les milliardaires ont la côte et peuvent facilement diriger une Puissance Mondiale. Il n'y a qu'à regarder actuellement du côté des Etats-Unis. Bref, pour s'être opposé à Poutine, il est arrêté en 2003 et enfermé en prison sur des accusations grotesques d'escroquerie et d'évasion fiscale. Je rigole car à ce train là, on peut enfermer la moitié des riches de la planète rien que si accorde crédit au Panama papers.
Bref, dans la présente fiction, on suit les aventures du fils de cet oligarque qui va apprendre à survivre. Certains faits sont exagérés mais d'autres sont très ressemblants. Pour le reste, on a un style qui ressemble beaucoup à du Largo Winch avec un second tome tourné directement vers les montages financiers. On ne s'ennuie pas avec ce thriller mais cela reste très léger. Du pur divertissement sur fond politique actuel.
Encore une très bonne découverte de cette année.
Il y a quelques semaines je n'aurait pas imaginé une seconde prendre cette bd, mais heureuse que le forum existe, vous m'avez convaincu et j'en suis ravi cet album vaut le détour, en dessous de Largo Winch et I.R.S mais très réusssi tout de meme.
Vive la suite.