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urant l’été 2009, Arte et les éditions Dargaud actionnent la machine à remonter le temps pour s’arrêter presque 30 ans en arrière, à l’aube des années 80. Pour l’occasion, la chaîne télévisée propose tous les mardis et jeudis, du 7 au 25 juillet, un programme spécial présenté par Philippe Manœuvre. Tandis qu’un ouvrage collectif de bande dessinée faisant appel aux souvenirs d’une quinzaine d’auteurs sort sous le titre de Summer of the 80’s.
Les deux premières nouvelles de l’album laissaient augurer d’un ensemble de grande qualité. D’un côté l'Oncle Paul, traité de façon humoristique par Emile Bravo, de l’autre, le style musical, marqué par Blondie, les B-52’s ou autre Grace Jones, croqué par Serge Clerc et sa ligne claire si caractéristique, entamaient de la meilleure des façons un florilège de morceaux choisis censés dépeindre au mieux cette période. Si d’autres auteurs, comme Nine Antico ou Bouzard, s’en sortent plutôt bien en se moquant gentiment et avec humour de la mode vestimentaire et capillaire, si Drouin et Clavery reviennent quant à eux sur quelques événements marquants avec en vrac l’affaire du Rainbow Warrior, l’élection de Reagan aux Etats-Unis, la chute du mur de Berlin mais aussi la folie des jeux vidéo tels que Tétris ou Pac-Man, les mini-histoires suivantes sont malheureusement beaucoup moins convaincantes.
La montée de l’individualisme et des inégalités sociales semblent avoir été le moteur des autres nouvelles comme celle d’Alfred et Chauvel, dénonçant les nuisances du thatchérisme ou celle de Gawronkiewicz et Janusz, démontrant les contradictions du socialisme en Pologne. D’autres encore utilisent l’accumulation de clichés ou l’étalage de détails parfois anecdotiques comme Jean-Claude Denis, mettant en scène son personnage de Luc Leroi, Catel et Paringaux dans Old Wave ou Winberly et Abel dans The Beautiful Ones. Quant aux quelques clins d’œil de Dabitch, mis en images par Cattelain, ils ne sont qu’une superposition de faits importants, comparés au passé anodin de certaines figures contemporaines.
La couverture, alléchante, reflète plutôt mal un ouvrage constitué de récits dont la qualité est très inégale. Un ensemble hétéroclite, comme la plupart des collectifs, qui ne parvient qu’à effleurer la richesse d’une décennie pas si lointaine.
Les années 80 ont été pour la plupart de gens de notre génération les meilleures car il régnait alors une atmosphère si particulière. J'avais envie d'une bd qui réussirait à les comprendre, à les transcrire et pourquoi pas les transcender... Le rêve n'est pas devenu réalité avec cette évocation réalisée par un collectif d'auteurs peu inspirés. Bref, ils sont passés à côté ...
Il y avait certes les séries (Dallas, Dynastie, Mac Gyver, Deux flics à Miami...) mais également la musique new-have ou pop et l'apparition des vidéos clips. Que dire également du cinéma avec des phénomènes comme Le grand bleu ou Top Gun, ou encore Indiana Jones. La liste de toute les productions serait très exhaustive tant la créativité côtoyait le côté kitch.
Il y avait également la vague du libéralisme marqué par le président Reagan aux USA ou encore la dame de fer Thatcher en Grande Bretagne. Il y a bien une évocation de tout cela mais cela reste tellement vague et anecdotique. Il n'y a pas quelque chose de vraiment original qui mettrait en valeur cette décennie totalement décalée et libérée. Par ailleurs, les auteurs semblent dire que ce sont des années qui ont mal vieilli au contraire des autres décennies. Bien entendu, je ne suis pas d'accord avec ce point de vue.
Au final, on pourra oublier ce one-shot. C'est dommage quand même.