A
près la trilogie du Bronx (Un pacte avec Dieu, Jacob le cafard, Dropsie Avenue), les éditions Delcourt rééditent The Big City, une anthologie de chroniques urbaines réalisées au début des années 80, lorsque Will Eisner enseignait à l’Ecole des arts visuels de New York.
Ce premier tome, La Ville, s’attache aux décors de New York, à ses rumeurs et à ses totems. Les bouches d’incendies, d’égouts ou de métro, les fenêtres et les perrons d’immeubles, les lampadaires et les feux tricolores, les poubelles ou les boîtes aux lettres, figurent autant de sentinelles imaginaires veillant le cœur de la cité, le cœur des murs, parfois aussi dur que celui des hommes. L’essence même de la ville, souligne Eisner, se trouve dans les crevasses de son sol, et dans les recoins de son architecture, là où le quotidien s’insinue. Et l’auteur de croquer avec humour et sensibilité, la Grosse Pomme de son enfance, son paysage social. Les récits se succèdent comme autant d’instantanés, de courtes vignettes, parfois muettes, parfois rythmées par la musique. L'album confirme, s’il était besoin, les talents d’observateur du maître de l’art séquentiel. Will Eisner délivre une œuvre touchante et populaire, sans misérabilisme ni complaisance, sur les anonymes et les petites gens.
A l’élégance, à la fluidité de la narration, se mêle un sens inné de la composition, que l’on sait pourtant mûrement théorisé (La bande-dessinée, art séquentiel, Le récit graphique), fourmillant de trouvailles graphiques et d’inventions typographiques. Le trait, rond et parfois caricatural apporte une touche de légèreté supplémentaire à ces saynètes douces-amères.
>>> Lire aussi la chronique de Dropsie Avenue.
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