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n homme mort n’arrive pas à reposer en paix. Sa conscience le tourmente, il doit la soulager …
Chômeur en proie au mal-être, Serge reprend contact avec celui qu’il a toujours haï, monté tenter sa chance à Paris il y a déjà sept ans : son frère Charles. Ce dernier lui propose de l’héberger et lui présente son épouse Sophie.
Appartement cossu, reconnaissance professionnelle, belle femme, belle gueule, sorties, maîtresses … tout, dans la vie de Charles renvoie à Serge ce qu’il n’a pas et sa médiocrité. En partageant le quotidien du couple, Serge décèle dans l’apparente réussite de son frère des fondations fragiles dans lesquelles il s’engouffre et qu’il utilise comme autant de tremplins favorables à sa reconstruction ... avant de perdre totalement pied.
Au-delà du drame qui se noue cet album met en exergue les dégâts causés par la seule pression sociale sur des êtres vulnérables, pointe la fragilité de l’harmonie d’un couple lorsque s’installe le déséquilibre entre les priorités et/ou les aspirations de chacun, propose une voie d’exploration des champs du désir et du déplaisir. La ponctuation subtile de l’ouvrage par des cases silencieuses, l’utilisation parfaitement dosée des voix off pour transcrire les pensées intimes et donner au récit un ton de confession, la chute de l’histoire qu’on a pu croire prévisible, révèlent une réelle maîtrise des techniques de narration.
Le jeu de l’alternance des couleurs froides, chaudes et flamboyantes, les cadrages rapprochés, les expressions qui se perdent dans les formes restituent parfaitement l’ambiance et renforcent l’impression de proximité. Le style graphique et l’esthétique générale qui se dégage font penser à Mattotti.
Illustré en peinture directe, fin, sensible, sans concession sur l’espèce humaine, très bien construit et très esthétique, cet album intimiste devrait combler les amateurs du genre mais semble aussi capable de relever un autre défi, celui de séduire les amateurs d’art pictural.
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