A
près la Chine et la Corée du Nord, le Myanmar ! (prononcez Birmanie si vous vous sentez plus d'affinités avec les pays démocratiques qui n'accordent pas de légitimité au pouvoir militaire en place). Accompagnant son épouse en mission sur place pour MSF, c’est aux commandes de la poussette-canne de son petit Louis que Guy Delisle se lance à la découverte de Rangoon avant d’étendre son rayon d’action et de rencontres. Dans les limites fixées par les autorités.
Présenté comme cela, un soupçon de moquerie inutile en prime, Chroniques birmanes ressemblerait à un bégaiement de Shenzhen et PyongYang (L’Association) dans lesquels l’auteur dépeignait déjà les conditions de vie austères et régentées qu’il avait eu l’occasion de découvrir au cours de voyages professionnels. Pourtant, ce nouvel album est aussi indispensable que les deux premiers (et par conséquent aussi ennuyeux pour ceux qui ne les ont pas goûté), tant la somme d’informations et d’anecdotes qui est ici consignée est intéressante et servie sur un ton finalement unique.
Bande dessinée de reportage ? Et pourquoi pas enquête d’investigation pendant qu’on y est ? Non, un récit de voyage, un point de vue d’occidental qui a passé un peu plus d’un an sur place. A découvrir le fonctionnement de ce pays, du moins ce qu’il est laissé à la vue de l’Etranger, à côtoyer la population locale mais aussi le « microcosmopolite » des expatriés volontaires et temporaires appartenant aux organisations gouvernementales ou non présentes dans le pays. Et c’est sur ce dernier point que Chroniques birmanes est différent de ses prédécesseurs où l’auteur, à cause de la barrière linguistique ou des cerbères collés à ses basques, était contraint de dialoguer essentiellement… avec lui-même. L’humour léger et jamais sarcastique répond aux situations dramatiques qui ne sont pas éludées. Pour autant, il prend soin de fixer et de rappeler, régulièrement, les limites de la portée de son témoignage qui ne prend pas des allures de manifeste.
Alternant dans le cadre de courtes séquences les témoignages avec un didactisme feutré et les expériences personnelles teintées d’autodérision, Guy Delisle prouve qu’il est LE spécialiste d’une discipline qu’il a peut-être d’ailleurs créée. Cette faculté à intéresser tout au long de copieux pavés est efficacement secondée par le style de son trait. La mise en place, le graphisme sont d’une lisibilité exemplaire. S’il est bien connu que les choses faciles en apparences sont probablement les plus difficiles à concevoir, il n’est pas rare de suspendre ici sa lecture pour constater que tout parait couler de source dans les planches de Delisle. Les rares passages sans texte et au rythme effrénées sont par ailleurs des moments particulièrement réjouissants. La dimension dramatique de certains faits n’est pas édulcorée et l’humilité qui transpire leur présentation formelle permet, sans que ce soit paradoxal, d'en accroître la portée.
L’accueil des Chroniques birmanes dans le "giron" Shampooing constitue la preuve que cette collection, après un démarrage plutôt quelconque, est en train de prendre une dimension tout à fait intéressante en alignant les pépites depuis quelques mois (la question de savoir si c'est "dans la ligne de ou dans les pas de" ne présente que peu d'intérêt pour le lecteur). Sans lui souhaiter de se cantonner au domaine des guides non touristiques de pays soumis aux dictatures dans lequel il excelle, comment ne pas reconnaitre que pour décrire les régimes autoritaires, Delisle fait... autorité ?
L'auteur livre ici une autobiographie assez intéressante d’un long séjour en Birmanie (ou Myanmar qui est le nom officiel de cet état), en Asie du Sud-Est où il a accompagné son épouse, membre d’une organisation de type humanitaire.
Ce pays a beaucoup souffert dans son passé par les envahisseurs : mongols, anglais, japonais… Depuis 1962, le pays est dirigé d’une main de fer par une junte militaire.
Ces chroniques birmanes nous montrent le quotidien d’un peuple subissant le joug d’une dictature. Le prix Nobel de la paix Aung San Suu Kyi assignée depuis une quinzaine d’année à résidence y est souvent évoqué. On apprend également que la capitale de ce pays va changer sur un simple coup de tête lié peut-être à l'astrologie. Cela nous montre quand même toute la bêtise humaine dans ce qu'il y a de plus flagrant.
J’aime bien les œuvres à l'instar de celle de Marjane Satrapi qui nous montre la vie d’un peuple méconnu des Occidentaux. Il n’y a rien de mieux que le regard de celui qui a vécu pour témoigner de ce qui se passe. J’approuve bien entendu le procédé ainsi que la dénonciation sans appel de la dictature en place.
Par contre, j’ai préféré l’œuvre de Satrapi qui me semble plus équilibrée. A la lecture de ces chroniques birmanes, je me suis laissé dangereusement dire qu’après tout, c’était à ce peuple de prendre son destin en main en chassant cette vieille armée déglinguée et qu’il fallait tout simplement un peu de courage et se responsabiliser. Bref, un discours simpliste qui ne serait pas du goût de tout le monde, je l’admets…
Entre l’achat de deux couches culottes à la superette du coin et du brunch chez l’ambassadeur, c’est certes intéressant mais trop factuel ou léger à mon goût pour convaincre pleinement. Néanmoins, cela m’a quand même donné envie de lire Shenzhen ou même Pyongyang pour continuer l’exploration des œuvres de ce témoin privilégié de notre temps.
Encensé par la critique et plébiscité par les lecteurs, c'est avec un à priori très favorable que je me suis lancé dans la lecture de CHRONIQUES BIRMANES. La déception n'en fut que plus grande !
J'ai trouvé ça terriblement ennuyant. A un tel point que je n'ai même pas réussi à aller au bout. Je me suis à peine arrêté au tiers. Peu de choses intéressantes (ni sur le pays, ni sur le travail de MSF), pas vraiment marrant, des anecdotes sur la vie des expat' sans grand intérêt ... bref, l'ennui total. Quant au dessin minimaliste et ultra simpliste, certes c'est un style mais il ne me plaît absolument pas.
Bref, cette BD est pour moi un coup d'épée dans l'eau. Dommage.
Longtemps, je suis passé à côté des livres de Guy Delisle. Il a fallu l’éclairage du festival d’Angoulême pour que cet auteur me soit révélé. Avec ses « chroniques de Jérusalem », j’ai reçu une véritable claque, et encore le mot est faible. Véritable huron du monde moderne, Guy Delisle nous offre une vision assez juste des pays qu’il habite.
Avec « Chroniques Birmanes » , antérieures à son périple palestinien (ou Israélien, cela dépend de quel côté du mur on se situe), Guy Delisle nous présente des épisodes de sa vie asiatique . Certes, chaque chapitre est assez, voire trop court, mais c’est très pertinent voire abracadabrantesque, comme le disait Rimbaud ou Chirac, je ne sais plus, comme ce déménagement soudain de la capitale.
Ce périple, c’est un mélange de Mister Bean et d’Ubu ou encore cela relève d’un monde à la Kafka.
Même si le dessin de Delisle est assez simpliste, il suffit à relater l’univers de MSF, ses difficultés d’actions sur le terrain, ses contradictions, mais son dessin souligne surtout, l’absurdité d’un régime militaire.
Malgré les 260 pages de l’album, cela se lit d’une traite. J’ai même eu un pincement au cœur à la fin, en quittant les personnages attachant de cet opus. Certes, cet album est un cran en dessous des incontournables « chroniques de Jérusalem » mais il se lit avec plaisir.
Instructif, drôle, et émouvant vers la fin, je recommande la lecture de cet opus……à tel point que j’entame avec impatience « Pyongyang » du même auteur, ouvrage qui parait-il reste son meilleur.
A suivre donc…
Je ne connaissais pas Delisle. Pire, "Chroniques Birmanes" dans les mains je n'osais le feuilleter : pas la peine, pensais-je, j'aime pas le dessin je ne rentrerai jamais dans l'histoire. Hé puis bon, zut, les gens en disent du bien quand même.De plus je sortais de "Rural" de Davodeau, j'étais dans ma période "BD documentaire", alors zou je me suis lancé dans l'aventure.
Et quel voyage ! J'étais là bas, parmi ces gens si loin de chez nous par la distance et par leur encloisonnement. Par des petites anecdotes cocasses , des passages de vie brefs mais pour autant extraordinaires ou plutôt extra-"notre"-ordinaire, j'ai plus appris de ce pays, de ces gens, des ONG que par n'importe quel autre vecteur d'information.
J'ai eu de la peine à la fin de cette BD, comme quand on reviens d'un long voyage, je quittai ce pays comme Delisle le quittai.
Après Pyongyang et Shenzhen, Delisle nous décrit avec humour et finesse la vie quotidienne sous un régime dictatorial. Régime corrompu et absurde, mais dont les habitants se révèlent attachants.
Le style narratif de l'auteur commence à être bien rôdé, mais il réussit une fois de plus à nous captiver par un récit qui pourrait somme toute être assez banal.
Après lecture... un seul mot me vient à l'esprit : l'ennui !
Pas trop marrant, pas très intéressant, on apprend pas grand chose, on découvre pas grand chose.
L'ennui total... dommage.
Bienvenue en Birmanie - pardon - dans l'union du Myanmar, puisque c'est ainsi que la junte au pouvoir a rebaptisé le pays en 1989.
Ayant dévoré les deux épisodes précédents. j'attendais avec une certaine impatience le troisième opus des aventures de notre sympathique québécois dans les pires endroits de la planète dont l'un au moins a été qualifié de "membre de l'axe du mal" par un dirigeant éclairé du monde libre.
Rien à dire au sujet du dessin : nous sommes en terre connue. Aucune surprise de ce côté-là !
Guy Delisle s'intéresse à un pays qui est sans doute l'un des plus isolé de la planète : ses déboires avec internet sont largement révélateurs de l'ambiance kafkaïenne et de suspicion qui règne dans le pays. Junte au pouvoir, généraux interchangeables aux chemisettes retaillées (je vous laisse découvrir pourquoi), problématique des ONG dans ces pays, décalage vertigineux entre le petit monde des expat' et la réalité du pays, électricité, système bancaire démentiel et archaïque, importation, rôle ambigu des multinationales étrangères, presse et censure, opposition politique : tout est décortiqué avec à chaque fois cette pointe d'humour irrésistible.
Alors ? Où est la surprise ? Guy Delisle n'est cette fois qu'un spectateur, il accompagne sa femme, en mission pour MSF. Coincé en ville sans autorisation de circuler, plus ou moins déconnecté du monde des ONG comme il le reconnaît lui-même, il s'occupe principalement de son fils Louis, en plus de donner quelques cours d'anim' et de finir sous les tropiques la BD [u]Louis au ski[/u] ....Son approche birmane est donc moins journalistique et plus centrée sur son expérience de "père au foyer". De nombreux épisodes sont plus "légers" que dans [u]Pyongyang[/u] ou [u]Shenzhen[/u]. Son expérience de la mousson par exemple, ou son contact avec les birmans - facilité par son ambassadeur de charme : Louis ... Preuve que la vie et le bonheur ne sont pas complètement étouffés en Birmanie.
C'est sans doute ce qui m'a déconcerté dans cet album.
A l'image d'une société contrastée entre l'horreur d'un pouvoir totalitaire et les
joies simples, mais précieuses, du quotidien, G. Delisle raconte en noir et blanc.
Plusieures années après "Birmanie, la peur est une habitude" (Khiasma édition),
Ce carnet de voyage vient rafraîchir nos mémoires ensablées et donner un ton
très concret à une réalité du bout du monde. C'était peu avant que le pays ne
bascule dans l'affrontement civil, avant que le rideau ne tombe à nouveau sur
nos mémoires ? Un très bel ouvrage, sensible, humain et humble.