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ann dispose d’un don qui fait des envieux : il peut agir sur son métabolisme, l’accélérer et le ralentir, et ainsi évoluer dans l’espace et le temps à un rythme différent de celui de ses congénères. Idéaliste forcené, il cherche à utiliser son pouvoir pour remettre un peu d’ordre dans une société qui le dégoûte et… lui donne la chasse. Plus encore que la crainte, les phénomènes inspirent curiosité et convoitise parce qu’ils remettent en cause les règles et l’ordre établi.
Le premier tome de Phenomenum avait séduit. Il offrait la possibilité à chacun de s’identifier à un personnage qui se voyait offrir un passeport pour une vie rêvée, certes risquée, mais surtout faite de luxure. Les bédégestistes, peut-être un peu plus sensibles à cette perspective que d’autres, en avaient fait leur lauréat pour la catégorie « Meilleur 1er album » en 2002. Pourtant, il n’emportait pas tous les suffrages cet album avec ses dialogues souvent un peu naïfs, son dessin perfectible aux perspectives parfois hasardeuse et sa conclusion déroutante. Mais la force de son sujet suffisait à donner l'envie de lire la suite.
Dix-huit mois plus tard, ce deuxième volet nous laisse une fois encore entre plaisir et doutes. Le récit est dense et emprunte successivement à plusieurs genres des thèmes qui ont fait leurs preuves : le progrès et les gadgets technologiques, la recherche scientifique et les inquiétudes qu’elle génère, la – gentille – critique sociale assortie d’une dénonciation de la corruption et des injustices, l’organisation secrète qui dirige le monde dans l’ombre, l’héritage du passé, les scènes d’action à la James Bond ou encore le poids de l’hérédité qu’elle soit génétique ou non.
Grâce à un mode de narration astucieux à défaut d’être novateur, le mélange des ingrédients donne à l’album un parfum de série B efficace et plaisante. Une fois encore, on pourra regretter quelques parti pris, pour des raisons plus ou moins discutables (le lecteur a ses faiblesses). Dommage par exemple que le rôle du personnage d’Emma soit sacrifié en une planche ou qu’on nous réchauffe le coup de l’hibernation mis cette fois à la mode viking pour donner un fils spirituel au héros. On préfèrera aussi passer sous silence l’impression laissée par la dernière planche qui, en cherchant un ultime rebondissement, en dévoile finalement trop sur l'une des intrigues que ce 2ème volet avait pris le temps de façonner. Pour le style du dessin, les avis risquent une nouvelle fois d'être très partagés.
Ne boudons cependant pas notre plaisir car les auteurs de Phenomenum atteignent leur objectif en nous proposant un récit alerte et séduisant. Si seulement le lecteur était en mesure d’accélérer le temps pour pouvoir lire dès à présent le 3ème et dernier volume de ce cycle…
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